mercredi 31 mars 2010

Température du 31 mars à Saguenay

Matin-----------------------------------------Après-midi

Regard «canon», regard poignard, regard meurtrier bienvenu

J'adore la photo qui coiffe cet article (ici) du Devoir (mars 2010) où Hillary Clinton lance un regard chargé de mépris au ministre conservateur canadien, Lawrence Cannon.
Je l'adore tant cette photo (j'appellerais cela un chef-d'œuvre) que je la reproduis seule et agrandie:

Crédit photo: Reuters/Chris Wattie

Quand le mépris étasunien s'adresse à quelqu'un qui le mérite (ô combien !), comme cet Anglophone québécois qui fait partie sans vergogne* d'un gouvernement d'extrême-droite puritain, fasciste, survivant attardé de l'époque Bush, partisan des sables bitumineux et ennemi de la liberté individuelle (surtout de celle des femmes) au nom d'une morale dépassée, antédiluvienne (celle de la « Bible Belt » du pays de la Secrétaire d'État), je ne puis qu'applaudir.
Quand on combat l'« Infâme » plutôt que de l'être soi-même on a droit à tous les suffrages.
Regardez la photo: le ministre des Affaires étrangères, malgré son nom (« Cannon »), semble s'évanouir sous le regard coup de « canon » de Mme
Clinton.
Quel merveilleux regard ! S'il pouvait être aussi puissant qu'un rayon laser!
Allez, Madame, faites-le disparaître avec vos beaux yeux menaçants, lui et tout le gouvernement dont il fait partie.

* Il y a aussi quelques minus québécois francophones dans ce gouvernement, la lie de leur peuple. Mais ils ne jurent pas parmi leurs compagnons ministres et députés canadiens de diverses origines, ils sont du même inane acabit.

Malbouffe et cocaïne

Continuons sur la malbouffe (c'est la suite du billet précédent « Chien pas chaud » ici)
Article très intéressant (ici) qui fait le compte rendu (sommaire) d'une expérience scientifique publiée originellement dans Nature Neuroscience et dont les résultats ont permis d'établir un parallèle entre consommation de malbouffe et consommation de cocaïne.
J'ai tendance à penser, quant à moi, que la malbouffe est beaucoup plus dangereuse pour l'humanité que la cocaïne et qu'on devrait inverser les lois : rendre légale la consommation de la cocaïne et illégale la malbouffe.
Évidemment il faudrait procéder selon les règles, expérimenter d'abord à petite échelle.
Mais je suis sûr du résultat final en ce qui concerne la santé de l'humanité et, sans doute, son bonheur.
Mais peut-être me leurré-je car je ne connais pas beaucoup de cocaïnomane.

Chien pas chaud

L'illustration du mot « hot-dog » n'est pas très bonne mais le petit chien est charmant. Je vous le présente donc.
Pour les Anglophones le mot «
dog » désignait un type de saucisses, et quand ils commandaient un « hot-dog » ils commandaient une « saucisse chaude ». Le pain n'était là que pour tenir la saucisse et éviter qu'on se brûle les doigts car une « saucisse chaude » se mangeait en marchant, sans ustensile.
On ne mangeait pas le pain au début, seulement la saucisse.
On aurait dû continuer car c'est sans doute le pain -et les sauces et condiments qu'on y ajoute- qui transforment le «
hot-dog » en malbouffe.
Le petit chien de la photo n'est pas comestible quant à lui, malgré les rumeurs qui couraient lors de l'invention du «
hot-dog ».
Et le « hot-dog » n'a rien de chinois.
On ne peut que le regarder avec plaisir et jouir de l'étonnement de ses petits grands yeux (a-t-il la forme d'une petite saucisse ?).
Voici la chanson et les paroles (de
Loulou Gasté) de la chanson qui porte sur un autre petit chien et qui me rappelle les années cinquante. Elle était (et est) interprétée par Line Renaud, aux yeux couleur de mer
:




Combien pour ce chien dans la vitrine?

Combien pour ce chien dans la vitrine?
Ce joli p'tit chien jaune et blanc,
Combien pour ce chien dans la vitrine?
Qui pench' la tête en frétillant.

Je dois m'en aller en Italie
En laissant tout seul mon mari
Un chien lui tiendra compagnie
En étant toujours près de lui.

Combien pour ce chien dans la vitrine?
Ce joli p'tit chien jaune et blanc,
Combien pour ce chien dans la vitrine?
Qui me regarde en frétillant.

Je viens de lir' que dans les nouvelles
Il y a des voleurs de cœurs
Si de mon mari le cœur chancelle
Il protègerait mon bonheur.

Je n'ai pas besoin de souris blanches
Ni mêm' d'un perroquet savant
Quant aux poissons roug's même un dimanche
Il aurait l'air bête en les prom'nant.

Combien pour ce chien dans la vitrine?
Ce joli p'tit chien jaune et blanc,
Combien pour ce chien dans la vitrine?
Eh bien c'est d'accord je le prends...

mardi 30 mars 2010

Température du 30 mars à Saguenay

Matin-----------------------------------------Après-midi

Tout s'écoule

Rien ne dure dans la vie malgré les apparences.
Nikki Gemmell a raison.
Si vous êtes passés aujourd'hui par le blogue de Denise Pelletier (ici) vous avez appris () qu'elle et moi célébrons pourtant aujourd'hui notre quarantième anniversaire de mariage (il y a eu des fleurs, repas au restaurant ce midi -chez Moutarde à Arvida-, dîner samedi soir au Bergerac, etc., et, peut-être, d'autres festivités auront-elles lieu encore).
Il y aurait donc dans la vie des choses qui durent?
Pas vraiment.
Le mariage dont nous célébrons l'anniversaire n'est pas celui que nous avons contracté il y a quarante ans tant il y a eu des changements, des rénovations, des révolutions.
Si vous visitez parfois les pays de vieilles civilisations vous vous êtes sûrement étonnés de voir les cathédrales médiévales toujours entourées d'échafaudages, subissant de minutieuses rénovations.
En réalité chaque chose qui semble durer est comme une cathédrale médiévale: si l'apparence reste la même, la plupart des éléments en ont été changés ou modifiées ou réparés.
L'apparence n'est qu'un illusion.
Ce qu'on célèbre quand on célèbre un anniversaire ce n'est pas une durée, c'est un perpétuel changement, une perpétuelle transformation.
Dans la vie rien ne dure, tout se transforme.
Rien n'est, tout s'écoule, on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve (j'ai l'impression de me remémorer une cours de philosophie où l'on étudiait Héraclite).

[...]
Tout fuit,
Tout passe.
L'espace
Efface
Le bruit.


lundi 29 mars 2010

Température du 29 mars à Saguenay

Matin-----------------------------------------Après-midi

Fantasmes

Crédit photo: WENN / SIPA

C'est une chanteuse états-unienne que je ne connais pas (Katy Perry *) avec un éléphant (je ne le connais pas non plus) et, je vous l'avoue (peut-être ai-je l'esprit mal tourné -comme d'habitude- ou, exceptionnellement, mal luné ce matin), j'ai rarement vu une photo aussi obscène (je veux dire aussi plaisamment obscène).
L'exercice musculaire auquel se livre cette chanteuse me semble aussi extrême (mais évidemment plus intelligemment orienté) que ceux auxquels s'est livré l'amateur de poids et haltères du billet précédent.
(Le diaporama où cette photo apparaît est ici).
Je ne sais pas si la scène se passe à Hollywood mais si oui, le monde du cinéma me semble renouer avec les mœurs libres et spirituelles de l'Hollywood des années trente, et c'est peut-être le signe que les États-Unis tout entiers (pensée grand écran ?) se sont engagés à nouveau dans la voie de la modernité et de la liberté d'esprit (et du corps, par conséquent), loin des miasmes républicains et puritains qui les asphyxient depuis tant de décennies, hélas.
Fantasmes de ma part ?

* On s'étonne que, selon Wikipédia (ici), le plus grand succès de cette chanteuse soit «I Kissed a Girl» car sa palette semble (ou semble devoir devenir) beaucoup plus large.

Ballons

On se dit en voyant cette photo qu'il s'agit sûrement d'un ballon (ou de plusieurs ou, en tous cas, de quelque chose en caoutchouc) qu'on a sculpté pour lui donner la forme d'un être humain caricaturalement musclé.
Mais il semble que ce soit un véritable humain et je ne sais qu'en dire, je ne peux que vous le présenter et sympathiser avec le muscle cardiaque de ce martyr de la musculation.
Et m'étonner de tant de travail, de tant d'abnégation, de tant de caresses à la fonte et au fer pour obtenir des choses non seulement inutiles mais nuisibles probablement, et qui vaudront à cet homme la seule admiration des amateurs de femmes à barbe et autres Bibendums.

Un rival ou un modèle?

Un autre rival (produit par Eileen Gray)?

dimanche 28 mars 2010

Température du 28 mars à Saguenay

Matin-----------------------------------------Après-midi

Vive l'heure permanente

Je déteste les changements d'heure et cela depuis ma plus tendre enfance.
Je déteste ces choses faites pour des raisons purement économiques qu'on transforme maintenant en raisons écologiques.
Surtout quand le changement me fait perdre une heure de tout, comme le changement d'heure du printemps d'il y a trois semaines en Amérique et d'aujourd'hui en Europe.
Je suis absolument d'accord avec cette association qui estime que, s'il a des avantages économiques et écologiques,

[l]e changement d'heure représente aussi un danger pour la santé et la sécurité des êtres humains [...] en augmentant les risques de crise cardiaque, le nombre d'accidents du travail et de la route, et en accentuant les problèmes de sommeil.

S'il faut choisir entre le couple étonnant économie/écologie (que dites-vous de ce couple maudit?) et la santé, je choisis la santé.

Vers la rétention de l'information?

Il y a à l'heure actuelle un mouvement -initié par la droite, il faut le remarquer- pour rendre l'information payante, totalement payante sur la Toile.
Cela a commencé par une solution de contenus partiellement payants dont je croyais qu'elle réunissait tous les avantages du payant et tous ceux du gratuit.
Mais cela ne semble pas suffisant aux propriétaires d'empire de presse, en particulier anglo-saxons (Murdoch par exemple, propriétaire du Times, hélas), qui veulent faire une rétention totale de l'information.
Je constate, pour ma part, que c'est une solution réactionnaire.
Mais attendons pour voir si elle va réussir (je ne le crois pas car, même dans l'information papier, il y a distribution de journaux gratuits qui contournent les tentatives impériales).
Quant à l'analyse d'information (que les empires détestent) je crois qu'elle sera offerte en dehors des empires.
Contre rémunération à la pièce?
Pourquoi pas?

samedi 27 mars 2010

Température du 27 mars à Saguenay

Matin-----------------------------------------Après-midi

Théâtre, masque et transsubstantiation

En l'honneur de la journée mondiale du théâtre, ce masque vu à Rome, qui, comme on le voit, n'est pas seulement un masque, n'est pas surtout un masque, mais plutôt un amplificateur de traits (il cache les traits des acteurs mais amplifie ceux des personnages) et un amplificateur de voix (il couvre la voix des acteurs en amplifiant celle des personnages) afin d'opérer, bien mieux que la messe, la transsubstantiation des individus en humanité, la transsubstantiation de la chair et du sang en pensée, la transsubstantiation de mots et de gestes en sentiments et en passions.
Et aussi, en l'honneur de cette journée, ma conviction que le théâtre n'est jamais autant lui-même que lorsqu'il emprunte le masque de l'opéra, masque suprême.
Voici l'aria « Cara sposa » de l'opéra « Rinaldo » de Georg Friedrich Haendel interprétée par le contreténor David Daniels :




Cara sposa

Cara sposa, amante cara,
dove sei?
dove sei?
Deh! Ritorna a’ pianti miei.

Cara sposa, amante cara, dove sei?
Ritorna, ritorna a’ pianti miei.
Cara sposa, Deh! Ritorna.
Deh! Ritorna a’ pianti miei.

Cara sposa, sposa cara, dove sei?
Deh! Ritorna,
dove sei?dove sei?
Deh! Ritorna, a' pianti miei.
Ritorna, a' pianti miei.

Deh! Ritorna, a' pianti miei.
Deh! Ritorna, a' pianti miei.

Del vostro Erebo sull’ara
Colla face del mio sdegno
Io vi sfido o spirti rei!

Le hérisson et le renard

Une distinction faite par Isaiah Berlin et rapportée par Roland Jaccard dans son compte rendu (ici) de la traduction d'un livre de George Steiner «Lecture. Chroniques du New Yorker» (Paris, Gallimard, collection «Arcades», 404 p.).
Cette distinction pourrait permettre de classer non seulement les penseurs ou philosophes mais les humains en général et cela au moyen d'animaux, comme dans les fables de La Fontaine, le hérisson et le renard.

Sir Isaiah Berlin, un penseur assez proche de George Steiner, distingue deux types de personnalités intellectuelles et artistiques : le hérisson et le renard. Un abîme, selon lui, sépare ceux qui, d’une part, rapportent tout à une seule vision centrale, à un seul système, plus ou moins exprimé et cohérent - les hérissons - et, d’autre part, ceux qui poursuivent plusieurs fins, souvent sans aucun rapport entre elles, voire contradictoire - les renards.

Les spécialistes (les hérissons) et les généralistes (les renards).
Les défensifs et les offensifs. Les attentistes et les activistes.
Je me demande si les choses sont aussi tranchées.

Arc-en-ciel, logique et comptine

Il y a le mot « arc-en-ciel » dans la comptine ci-dessous et c'est le seul lien qui existe entre elle et la photo ci-dessus où, comme vous le voyez, il y a une partie d'arc-en-ciel.
(Nostalgique, la photo, malgré ses couleurs, car elle exprime un désir de retour des fins de pluie d'été).
La comptine est une variante de la comptine dite « Des trois p'tits chats ».
Elle est circulaire, c'est-à-dire qu'elle finit comme elle a commencé après avoir parcouru un long chemin acrobatique sur les dernières et les premières syllabes des mots qu'elle réunit (on devrait peut-être dire « qu'elle empile »).
Selon moi, cette comptine (et toutes ses variantes) livre le secret du fonctionnement de l'esprit humain, et probablement de l'esprit en général, y compris celui des animaux (dont celui, évidemment, des trois p'tits chats). La logique n'est qu'un épiphénomène.

trois p'tits chats
chapeau d'paille
paillasson
somnambule
bulletin
tintamarre
marabout
bout d'cigare
garde-fou
fou de rage
rage de dents
dentifrice
frise à plat
platonique
nique terre
terrassier
scier du bois
boisson chaude
chaudière
ermitage
tache de suie
suis pas contre
contrebasse
basse-cour
courtisane
Jeanne d'Arc
d'arc-en-ciel
ciel couvert
vermifuge
fugitif
typhoïde
identique
tic nerveux
veuve de guerre
guerre de Troie
trois p'tits chats

vendredi 26 mars 2010

Température du 26 mars à Saguenay

Matin-----------------------------------------Après-midi

Pellan amérindien

Denise Pelletier fait (ici), sur son blogue, un excellent compte rendu de l'Exposition Pellan présentée au Centre national d'exposition de Jonquière jusqu'au dimanche 28 mars prochain (plus que deux jours avant qu'elle se termine) dont je vous ai un peu parlé déjà.
J'ai eu peu l'occasion de vous en parler à nouveau comme je vous l'avais promis.
Mais je voudrais signaler quelques-unes des choses qui m'ont plu à cette exposition et c'est d'abord ce qui m'a semblé une inspiration amérindienne dans certaines des œuvres d'Alfred Pellan, au-delà du Surréalisme mais peut-être, en partie, à cause du Surréalisme dont certains membres avaient beaucoup de prédilection pour les « arts primitifs » (qu'on appelle maintenant « arts premiers » pour éviter la connotation péjorative que l'on sent dans le mot « primitif »).
Voyez :
Cette inspiration se marque même dans ce que l'artiste a appelé des « minibestiaires », des sculptures miniatures de bois, dont voici quelques exemples et dont il y a aussi des exemplaires à l'exposition du Centre national d'exposition de Jonquière:


Et je m'en voudrais de ne pas signaler la présence, dans un autre ordre d'idées, des magnifiques masques de théâtre que Pellan avait produits pour une représentation de « La Nuit des Rois » de Shakespeare, en même temps que les costumes et les décors, également magnifiques.
Je ne puis vous en présenter que ceux-ci, sur une photographie de la salle du Musée national des beaux-arts du Québec où sont exposées celles des œuvres de Pellan que le Musée possède (il y en a un certain nombre à Jonquière, splendides) :

Voici une photo du Théâtre du Nouveau Monde qui donne une petite idée des masques, costumes et, peut-être, décors de Pellan pour cette « Nuit des Rois »:

Des souliers «pieds nus»

©vibramfivefingers.com

Il semblerait qu'il serait préférable de courir pieds nus. On éviterait ainsi d'écraser ses talons comme on le fait quand on court avec des chaussures, ce qui est nocif pour la colonne vertébrale et pour la cheville, entre autres.
Ceux qui courent pieds nus s'appuient plutôt sur l'avant du pied et évitent ainsi ces inconvénients.
Mais pour diverses raisons (risques de blessures et d'infection du pied notamment) on ne peut pas vraiment courir pieds nus à moins d'y être habitué, comme les coureurs éthiopiens ou kenyans par exemple.
La compagnie Vibram Five Fingers propose donc les chaussures que vous voyez ci-dessus qui allient, dit-on, les avantages du pied nu à ceux de la chaussure.
Je les ai remarqués parce qu'ils ressemblent à des pieds et que vous connaissez mon intérêt pour ces membres.
J'espère qu'on les fabrique sur mesure car je remarque que, dans la photo, ils ont une forme de pied égyptien, ce qui les rendra inconfortables je pense pour les personnes qui ont d'autres formes de pieds.
Mais voyez la publicité très convaincante où le producteur affirme qu'on peut les utiliser non seulement pour la course mais pour toutes les activités d'entraînement sportif. Le yoga par exemple, comme ici:

©vibramfivefingers.com

jeudi 25 mars 2010

Température du 25 mars à Saguenay

Matin-----------------------------------------Après-midi

De l'abus de la puissance sur les âmes aux abus de la puissance sur les corps

Dans une interview publiée sur Libération.fr (ici), Christine Pedotti fait une hypothèse intéressante à propos de la pédophilie chez les prêtres catholiques.
Voici l'hypothèse de cette historienne catholique:

Je ne suis pas du tout certaine qu'il y ait une corrélation entre le célibat des prêtres, la frustration sexuelle et la pédophilie. Je crains qu'il y ait, en revanche, une corrélation entre la pédophilie et une institution qui pense qu'elle détient la vérité et se place dans une situation de toute-puissance, cachant ainsi des faits qui sont individuellement épouvantables mais statistiquement ordinaires. Les scandales de pédophilie n'ont rien à voir avec le célibat des prêtres mais tout avec la puissance de l'institution. Il faut s'interroger sur la façon dont l'institution met des hommes en situation d'autorité sur les âmes, et dont cette autorité sur les âmes peut être pervertie en pouvoir sur les corps.

Les prêtres profitent de la puissance de l'institution et, surtout, du pouvoir que l'institution leur accorde sur le salut éternel des fidèles pour exercer une contrainte sur les corps.
La pédophilie quand il s'agit d'enfant, mais d'autres formes de contrainte sur les corps des adultes par exemple.
Vous avez sûrement en mémoire ces menaces de damnation éternelle que les prêtres québécois fulminaient -et tout le clergé catholique en chœur- à l'égard des femmes qui, pour préserver leur santé en ne mettant pas au monde un enfant tous les neuf mois, désiraient se refuser aux étreintes de leur mari.
C'était là un autre type de contrainte sur les corps équivalant, au moins, à la pédophilie et tout aussi dommageable psychologiquement pour des adultes cette fois.
La cause de tous ces abus -et pas seulement de la pédophilie mais aussi de la pédophilie- résiderait donc dans le pouvoir terrible -une sorte de toute-puissance- que l'Église catholique (et toutes les religions de même acabit) accorde sans surveillance et sans limite aux membres de son clergé
sur les croyants et les fidèles.
Y aurait-il dans les codes criminels la définition d'un crime correspondant à ces abus de pouvoir?

Encore une question de langue

Crédit photo: PC

On m'a menacé d'accusations de discrimination à l'égard des animaux si je ne vous présentais pas une photo de ce jaguar.
C'est qu'on a jugé que sa langue l'emporte en longueur sur celle de Leo Messi, que je vous ai présenté il y a quelques jours (ici), et que je devais donc au jaguar ce que j'avais donné au joueur du FC Barcelone.
Tous les animaux sont beaux, ai-je jugé.
Voici donc le jaguar de talent.
Je ne suis pas sûr que celui-ci -pensionnaire du jardin zoologique de Schönbrun en Autriche- l'emporterait sur tous les jaguars en ce qui concerne la longueur de sa langue, mais les jaguars sont moins prisés par les photographes sportifs que les joueurs humains et je ne dispose pas de photographies d'autres jaguars pour dresser un podium.
Je vous présente donc celui-ci, cédant volontiers aux menaces.

P.S. Je reviens car je me suis souvenu d'un poème de Leconte de Lisle qui parlait d'un jaguar,«le rêve du jaguar», que j'ai retrouvé sur la Toile.
Je vous le présente en supplément à la photo. Remarquez que le poème fait mention de la langue du jaguar, autre bonne raison de vous le présenter.

Le rêve du jaguar

Sous les noirs acajous, les lianes en fleur,

Dans l'air lourd, immobile et saturé de mouches,
Pendent, et, s'enroulant en bas parmi les souches,
Bercent le perroquet splendide et querelleur,
L'araignée au dos jaune et les singes farouches.
C'est là que le tueur de boeufs et de chevaux,
Le long des vieux troncs morts à l'écorce moussue,
Sinistre et fatigué, revient à pas égaux.
Il va, frottant ses reins musculeux qu'il bossue ;
Et, du mufle béant par la soif alourdi,
Un souffle rauque et bref, d'une brusque secousse,
Trouble les grands lézards, chauds des feux de midi,
Dont la fuite étincelle à travers l'herbe rousse.
En un creux du bois sombre interdit au soleil
Il s'affaisse, allongé sur quelque roche plate ;
D'un large coup de langue il se lustre la patte ;
Il cligne ses yeux d'or hébétés de sommeil ;
Et, dans l'illusion de ses forces inertes,
Faisant mouvoir sa queue et frissonner ses flancs,
Il rêve qu'au milieu des plantations vertes,
Il enfonce d'un bond ses ongles ruisselants
Dans la chair des taureaux effarés et beuglants.

mercredi 24 mars 2010

Température du 24 mars à Saguenay

Matin-----------------------------------------Après-midi

Froid parallèle

J'ai parlé la semaine dernière d'un baiser d'escaliers à Montréal (ici).
Je vous présente deux escaliers qui, non contents de ne pas s'embrasser, semblent vivre côte à côte sans se regarder.
Reflet assez exact de la relation des voisins dans les grandes villes, du moins dans celles que je connais.
Peut-être la différence de saison accentue-t-elle ici l'impression de froideur.

L'indifférence

Que n'ai-je à te soumettre ou bien à t'obéir ?
Je te vouerais ma force ou te la ferais craindre ;
Esclave ou maître, au moins je te pourrais
[contraindre
À me sentir ta chose ou bien à me haïr.

J'aurais un jour connu l'insolite plaisir
D'allumer dans ton cœur des soifs, ou d'en
[éteindre,
De t'être nécessaire ou terrible, et d'atteindre,
Bon gré, mal gré, ce cœur jusque-là sans désir.

Esclave ou maître, au moins j'entrerais dans ta vie ;
Par mes soins captivée, à mon joug asservie,
Tu ne pourrais me fuir ni me laisser partir ;

Mais je meurs sous tes yeux, loin de ton être
[intime,
Sans même oser crier, car ce droit du martyr,
Ta douceur impeccable en frustre ta victime.

Μονοτονία

Την μια μονότονην ημέραν άλλη
μονότονη, απαράλλακτη ακολουθεί. Θα γίνουν
τα ίδια πράγματα, θα ξαναγίνουν πάλι —
η όμοιες στιγμές μας βρίσκουνε και μας αφίνουν.

Μήνας περνά και φέρνει άλλον μήνα.
Aυτά που έρχονται κανείς εύκολα τα εικάζει·
είναι τα χθεσινά τα βαρετά εκείνα.
Και καταντά το αύριο πια σαν αύριο να μη μοιάζει.


Monotonie

Monotone, une journée succède l'autre,
toujours pareille à celle d'avant.
Les mêmes gestes qui se répètent,
les mêmes moments viennent et nous quittent.

Un mois succède à l'autre;
l'ennui d'hier, qui nous revient.
Et ce demain que l'on espère
finit par ne plus être demain.


Monotonie

Un jour monotone en suit un autre
monotone, identique. Les mêmes choses
vont se produire, et se reproduiront encore —
pareils sont les instants qui nous trouvent et nous
[quittent.

Un mois qui s'écoulent en amène un autre.
Ce qui vient est facile à imaginer;
c'est ce pesant ennui d'hier. Au point
que demain n'a déjà plus l'air d'être demain.

traduit par Dominique Grandmont,
Poésie/Gallimard


Choses normales et choses anormales

Page d'une des éditions originales des Essais
avec des corrections de la main de Montaigne

Il y a un essai de Montaigne intitulé « De la Coustume et de ne Changer Aisément une Loy Receue » : ce titre respecte l'orthographe du 16e siècle et il y a eu, vous vous en doutez bien, plusieurs réformes de l'orthographe du français depuis ce temps contre lesquelles, à chaque fois, les pisse-vinaigre ont vitupéré.
Et selon le français actuel ce titre pourrait être : « À propos de la coutume et des problèmes qu'il y a à changer des habitudes qu'on nous a imposées ».
Ce sont ces problèmes qui se posent à propos de la réforme de l'orthographe.
Dans cet essai
Montaigne énumère un certain nombre de coutumes que d'autres peuples que le sien trouvent normales à son époque et pas le sien.
(C'était aussi le peuple de nos ancêtres à nous, Québécois, puisque la Nouvelle-France n'était pas encore fondée)
En voici un certain nombre (je vous renvoie à l'essai pour d'autres, il y en a beaucoup) :


1. Il est des peuples où l'on tourne le dos à celui qu'on salue et où on ne regarde pas celui qu'on doit honorer.

2. Il est des peuples où les vierges montrent leur sexe et où les femmes mariées le cachent.

3. Il est des peuples où il se voit des bordels publics de mâles.

4. Il est des peuples où les hommes portent leur charge sur la tête et les femmes sur les épaules.

5. Il est des peuples où les femmes pissent debout et les hommes accroupis.

6. Il est des peuples où les maisons sont sans porte, sans fenêtre, sans coffre qui ferme.

7. Il est des peuples où les maris prêtent à leur hôte leur femme afin qu'ils en jouissent contre paiement.

8. Il est des peuples qui ont un chien pour roi.

9. Il est des peuples qui mangent leur père afin de donner à l'auteur de leurs jours la plus digne et la plus honorable sépulture.

10. Il est des peuples où l'on pleure la mort des enfants et où on se réjouit de celle des vieillards.

11. Il est des peuples où les femmes qui perdent leur mari par mort violente peuvent se remarier et les autres non.

12. Il est des peuples où les femmes sont si peu de chose qu'on les tue dès leur naissance quitte à en emprunter aux peuples voisins quand on en a besoin.

Et les peuples pour lesquels ces coutumes sont normales les considèrent également comme raisonnables, c'est-à-dire obéissant aux règles de la raison.
Quant à nous, non seulement nous ne considérons pas ces coutumes comme normales mais nous les considérons comme déraisonnables.
Pourtant celle, par exemple, qui consiste à dévorer son père pour lui donner une sépulture honorable me semble raisonnable même si elle me donne des haut-le-cœur.
Et ce qui semble anormal à
Montaigne dans le fait de pleurer la mort des enfants et de ne pas pleurer la mort des vieillards me semble un peu plus normal qu'à lui.
Les vieillards dont je pleure la mort sont ceux que j'aime, mais je pleure moins la mort de ceux-là -qui ont eu la chance de vivre leur vie- que celle d'un enfant dont la vie me semble plus précieuse à cause des promesses dont elle est porteuse.
Nous ne pouvons pas nous empêcher de trouver pleines de raison les choses auxquelles nous sommes habitués et un peu, beaucoup ou complètement folles les choses auxquelles les autres sont habitués.
Et vice-versa.
Mais qui a raison?