dimanche 30 novembre 2008

Température du 30 novembre 2008 à Saguenay

Matin---------------------------------------Après-midi

Claude Lévi-Strauss, 100e anniversaire

Le 28 novembre dernier, c'était le 100e anniversaire de la naissance de Claude Lévi-Strauss dont vous pouvez voir un dessin auto-portrait, qu'il a fait le 20 août 2007, ci-dessus.
J'admire profondément ce savant. Selon moi c'est l'un des plus grands savants auxquels l'humanité a donné naissance.
Je cherche depuis longtemps un moyen de lui rendre hommage. Je l'ai déjà fait ici, dans ce blogue où je l'ai placé en compagnie d'autres savants ou artistes que j'aime: Freud, Einstein, Proust.
Auxquels j'ajoute aujourd'hui Darwin.
J'ai décidé de lui rendre hommage souvent et brièvement.
Je le fais aujourd'hui en vous présentant l'auto-portrait ci-haut et en vous permettant de lire un article du journal Le Figaro le concernant que j'ai placé ici et un article de Télérama que j'ai placé .

L'Amour pour se distraire


L'amore fa passare il tempo, il tempo fa passare l'amore.

L'amour fait passer le temps, le temps fait passer l'amour.
 
Le même proverbe dans deux langues différentes.
Mais celles-ci y montrent leur étroite parenté dans la construction syntaxique identique qu'elles lui donnent.
Il n'en reste pas moins que ce proverbe me rend perplexe.
En français, l'expression «faire passer le temps» signifie «s'occuper ou se distraire pour éviter l'ennui».
Dans le proverbe, du moins dans sa version française (je ne sais pas ce qu'il en est dans la version italienne), l'amour est donc considéré comme une simple occupation ou une simple distraction faite pour éviter l'ennui.
C'est ce qui me rend perplexe.
Surtout que ce que je pourrais appeler ce «peu de poids affectif de l'amour» est confirmé dans la deuxième partie du proverbe: «le temps fait passer l'amour». L'amour est une simple distraction et n'est que passager.
J'avais l'impression que l'amour était plus que cela.

Je n'ai peut-être pas assez lu Marivaux ou Musset.

samedi 29 novembre 2008

Température du 29 novembre 2008 à Saguenay

Matin---------------------------------------Après-midi

Coquelicots

On dit que les échanges de projectiles pendant les combats de la Première Guerre mondiale en France, -surtout dans le Nord- ont tellement déplacé et remué la terre des champs de bataille, que les graines de coquelicots -libérées qu'elles ont été des profondeurs du sol où elles étaient piégées- ont permis une floraison rouge exceptionnelle dans les champs.
Ceux-ci sont devenus ainsi couverts comme de sang.
La photo ci-dessus ne date pas de cette époque mais la floraison de coquelicots semble toujours exceptionnelle aux Québécois que nous sommes pour qui ces fleurs sont inconnues -du moins dans leur état sauvage.
Nous étions toujours étonnés, pendant le temps de nos études à Aix-en-Provence, de les voir surgir partout -le longs des voies ferrées par exemple, et non seulement dans les champs- comme on voit des pissenlits au Québec.
Ces merveilles rouges perchées et penchées sur leurs (trop) longues et frêles tiges, oscillant au moindre «zéphyr», comme dirait La Fontaine.

Que de fois nous avons tenté d'en couper pour en faire des bouquets mais les coquelicots se flétrissaient presque immédiatement.
C'est le spectacle des champs couverts de ces fleurs de sang qui a inspiré un poème à un soldat anglophone et ce poème a imposé, dans les pays de l'ancien empire britannique, le coquelicot comme symbole du souvenir des soldats tombés au champ d'honneur commémoré le 11 novembre, jour de l'Armistice qui a mis fin à cette Première Guerre.
Voici ce poème (il est en anglais, il en existe une traduction qui ne me satisfait pas*) qui a donné naissance -comme tous les poèmes- à un élément de la réalité qui est la nôtre:

In Flanders fields the poppies blow
Between the crosses, row on row
That mark our place ; and in the sky
The larks, still bravely singing, fly
Scarce heard amid the guns below.

We are the Dead. Short days ago
We lived, felt dawn, saw sunset glow,
Loved and were loved, and now we lie
In Flanders fields.
Take up our quarrel with the foe:
To you from failing hands we throw

The torch ; be yours to hold it high.
If ye break faith with us who die
We shall not sleep, though poppies grow
In Flanders fields.


Voici une fleur de coquelicot sur sa tige:


* Voici une traduction en vers libres que je propose. Veuillez me suggérer des modifications si vous le jugez bon:

Au champ d’honneur, coquelicots éclosent
entre les croix, de tombe en tombe,
ils marquent notre place; et dans le ciel
les alouettes chantent encore courageusement et volent
même si on les entend à peine dans le fracas des tirs.

Nous sommes morts. Il y a peu de jours
Nous vivions, aimions voir flamboyer aurores et crépuscules
Aimions, étions aimés, et maintenant nous sommes étendus
Au champ d'honneur.

Continuez le combat contre l'ennemi
Nos bras meurtris vous tendent le flambeau,
À vous maintenant de le porter bien haut.
Si vous n'êtes pas dignes de la confiance des morts
Nous ne reposerons pas en paix parmi les coquelicots éclos
Au champ d'honneur

vendredi 28 novembre 2008

Température du 28 novembre 2008 à Saguenay

Matin---------------------------------------Après-midi

Toi, spectateur, dit Velasquez, que nous apportera ton regard?

Ces jeunes spectateurs participent
à leur tour à la révolution de l'art moderne.
Remarquez le «The Quiet Revolution»
sur le t-shirt de l'un d'eux. Observez la jeune fille
qui tend le bras: elle répond à la demande de
Velasquez. 

Cliquez pour zoomer.

Cette photo n'est pas de moi car les photos étaient interdites, si je me souviens bien, quand nous sommes allés au Musée du Prado.
Mais elle dit si bien ce qui fait que le tableau que les spectateurs du premier plan regardent, « Les Ménines » de Velasquez, est révolutionnaire, est l'un des premiers tableaux de l'ère moderne de l'art et de la peinture, que je me sens justifié de vous la présenter (j'en cherche l'auteur que je vous nommerai lorsque je l'aurai trouvé).
Dans cette photo il y a le tableau et il y a les spectateurs qui le regardent.
Et si l'on observe bien le tableau, la plupart des personnages qui y sont présents semblent, eux aussi, regarder les spectateurs.
En vérité, on nous a dit que ce que les personnages regardent, ce sont les ombres de personnages qui sont représentés dans le miroir situé au fond de la scène que présente le tableau, le roi Philippe IV d'Espagne et la reine Marianne.
Mais cela, c'est le subterfuge qu'a imaginé Velasquez pour que son tableau ne soit pas considéré comme non réaliste et rejeté, éventuellement détruit à cause de la négligence ou du mépris à l'égard des objets rejetés.
En réalité ce que Velasquez voulait aussi représenter (car il voulait représenter beaucoup de choses et certaines dont il ne pouvait pas être conscient) c'est cette révolution dans l'art qui, à partir de la notion de « libre examen » mise de l'avant par les Protestants au 16e siècle (peut-être la seule bonne chose qu'ils aient accomplie), a abouti à considérer les spectateurs comme, au moins, les « co-créateurs » d'une œuvre d'art, que ce soit un poème, un livre, un bâtiment ou, comme ici, un tableau.
Ce que Velasquez demande à ceux que lui et la plupart des personnages (même le roi et la reine dans leur miroir) de son tableau regardent, à ces jeunes gens qui sont là dans la photographie mais aussi à vous, à moi, à tous ceux qui, un jour ou l'autre, ont regardé « Les Ménines », ce qu'il leur demande c'est de s'ajouter au tableau, de l'élargir de leur pensée, de leur émotion, de leur réflexion, de le refaire comme il est (comme le Pierre Ménard* de Borgès) de le faire exister à nouveau et pour l'éternité en en devenant eux aussi des personnages.
Il en est ainsi de toute œuvre : un livre, un tableau, un texte, ou une pièce musicale auxquels leurs spectateurs, leurs auditeurs, leurs lecteurs ne s'ajoutent pas ou ne s'ajoutent plus n'existe pas, ne signifie pas, n'agit pas et meurt.

Peut-être en est-il ainsi pour tout ce qui existe au monde.
Tout ce qui existe nous dit peut-être, comme Velasquez dans son tableau : regarde-moi, observe-moi, protège-moi. Je n'existe pas sans toi.
J'ai besoin que tu existes vraiment, que tu sois un véritable spectateur avec ses propres pensées, ses propres réflexions, ses propres émotions, pour exister, moi, en te faisant exister, toi.


* dans Pierre Ménard, auteur de Don Quichotte.

jeudi 27 novembre 2008

Température du 27 novembre 2008 à Saguenay

Matin---------------------------------------Après-midi

L'Âge d'or de l'Europe médiévale sur TV5-Québec



C'est le film-annonce de l'émission «Des Racines et des Ailes» qui sera présentée le lundi 1er décembre prochain à TV5 du Québec à 20h.
Le sujet, comme vous le verrez dans le film-annonce, est «L'Âge d'or de l'Europe médiévale» et l'émission nous permettra de visiter (ou de revisiter pour ceux qui ont déjà visité ces villes) Provins (en France, que je n'ai malheureusement pas encore visitée), Sienne (en Italie, que j'ai visitée et beaucoup aimée) et Grenade (en Espagne, que j'ai visitée récemment et que l'émission me fera sans doute aimer davantage, comme je me connais -le «médiatisé» me plaisant toujours davantage que la réalité).
Ah! Si toutes les émissions étaient comme «
Des Racines et des Ailes»!

Idée publicitaire super

(Photo prise à Hambach en France.
Droits à Reuters/Vincent Kessler
)


Placer ainsi les petites voitures Smart dans un présentoir géant comme s'il s'agissait de montres ou de bijoux sur le comptoir d'un grand magasin, n'est-ce pas super comme idée publicitaire?
Comment mieux dire sans écrire un mot que « la Smart est un bijou
» ? 
Littéralement.

mercredi 26 novembre 2008

Température du 26 novembre 2008 à Saguenay

Matin---------------------------------------Après-midi

Masque et œil

Après si longtemps je vous présente un bel œil bleu masqué dans une photographie noir et blanc: voir et ne pas être vu. N'est-ce pas une névrose?
Tiré de l'article de Wikipédia:

On remarquera que dans un très grand nombre de langues le mot français « Voyeur » a été adopté pour désigner cette pratique. On a ainsi en anglais Voyeurism, en allemand Voyeurismus, en bulgare Воайорство, en bosniaque Voajerizam, en catalan Voyeurisme, en croate Voajerizam, en danois Voyeurisme, en espagnol Voyeurismo, en finlandais Voyeurismi, en indonésien Voyeurism, en islandais voyeurismi, en lituanien Vojerizmas, en néerlandais Voyeurisme, en polonais voyeuryzm, en portugais Voyeurismo, en russe Вуайеризм, en serbe Воајеризам, en slovaque Voyeurizmus, en suédois Voyeurism et en tchèque Voyeurismus.

La Dame d'«El Corte Inglés» de Barcelone et les «El Corte Inglés» d'Espagne

(Cliquez cette image pour zoomer)

C'est là une magnifique publicité du grand magasin « El Corte Inglés », qui a des succursales dans toutes les grandes villes d'Espagne.
Ci-dessous à Barcelone, Plaça Catalunya, une très belle architecture :


Là à Séville :


J'ai aussi photographié l'un des trois bâtiments de celui de Madrid qui est situé près de la Puerta del Sol :

Extérieur


Intérieur


Manifestement la publicité mettant en scène la jeune femme avec une robe de mosaïque a été faite pour souligner la relation étroite qui existe (par la volonté du magasin) entre « El Corte Inglés » et Barcelone (la publicité se trouvait dans un magazine distribué à Barcelone).
Cette relation est représentée par la mosaïque (et par celle qui en est vêtue) qui ressemble à celles que Gaudi a fait faire pour le Parc Güell et à d'autres que l'on rencontre même sur la Rambla.
Quand je visite un pays un de mes plaisirs est d'en fréquenter le plus possible les grands magasins et les centres commerciaux.
Je ne parle pas de Québec et Montréal où, sous un quelconque prétexte, j'entraîne ma femme jusqu'au bout du métro (ce qu'elle ressent comme un voyage au bout du monde) ou des trajets d'autobus pour ajouter tel ou tel grand magasin, tel ou tel centre commercial à mes connaissances (à ma collection mentale).
À Londres, il me fallait visiter « Harrod's », à Paris, les « Galeries La Fayette » et le « Printemps » (ceux-là nous facilitent la tâche car ils sont tous deux derrière l'Opéra Garnier), à Istanbul, « Le Grand Bazar », etc.
En Espagne je n'ai eu de cesse de nous faire entrer dans tous les magasins « El Corte Inglés » que nous rencontrions, et d'essayer (plus ou moins subtilement) de convaincre toutes les compagnes et tous les compagnons de voyage que nous avions d'aller y magasiner.
Je suis ainsi.
Quel bonheur (il faut le partager) cette sensation d'avoir autour de soi tous les produits de la Terre, et certains qu'on ne verra nulle part ailleurs, offerts ...
Voici quelques mosaïques de Barcelone qui sont les sœurs de la dame (et de sa robe) de la publicité d'« El Corte Inglés ».

Mosaïque sur le sol de la Rambla, près de la station Liceu (il pleuvait ce jour-là)


mardi 25 novembre 2008

Température du 25 novembre 2008 à Saguenay

Matin---------------------------------------Après-midi

Esprit futile à Grenade

Mon esprit est si futile: à Grenade, plutôt que d'admirer ce qui était admirable (l'Alhambra, les Jardins du Generalife, les petites rues du quartier de l'Albaicin), je me laissais occuper l'esprit par ces lampadaires sur la Gran Via (ce sont les lampadaires qui éclairent les trottoirs, il y en a d'autres installés en hauteur pour la rue: intéressant, n'est-ce pas?).
Et j'avoue avoir pensé à cette occasion à la controverse qui avait agité les Montréalais lorsqu'on leur avait proposé des lampadaires qui sortaient un peu de l'ordinaire il y a quelques années.
Les lampadaires qu'on leur proposait étaient pourtant beaucoup plus ordinaires que ceux de Grenade.

Mais peut-être y a-t-il eu aussi une controverse à Grenade.
Voyez-en un exemplaire isolé en haut et les lampadaires en rangées ci-dessous, le soir (plus haut voyez les lampadaires pour la rue, vraiment plus ordinaires).


Citoyen éclairé

Un renseignement pris dans le module «Le saviez-vous?» de la colonne de droite de ce blogue (très souvent je trouve ce module inane mais parfois il s'y trouve un renseignement intéressant comme maintenant).
J'ajoute à ce renseignement cette interview d'une jeune Noire évangéliste états-unienne, avant les élections présidentielles de 2004, qui disait voter pour Bush afin qu'il puisse éviter l'enfer à un grand nombre d'États-uniens en votant des lois contre l'avortement, contre le mariage gay, etc., bref en votant des lois contre la liberté de chacun de décider de sa propre vie.
En votant des lois anti-démocratiques.
J'ajoute à cela qu'une proportion non négligeable des électeurs états-uniens croit que le monde a été créé en 7 jours par un démiurge il y a 6000 ans.
Je crois que les électeurs d'un pays libre ne le deviennent pas automatiquement par la naissance ou par leur accession à la majorité légale: un citoyen doit être éclairé et, pour être éclairé, il doit avoir eu accès à une éducation non biaisée, démocratique.
Tant que cela ne sera pas, la démocratie ne fonctionnera pas ou alors, au hasard, comme une loterie, comme maintenant.

lundi 24 novembre 2008

Température du 24 novembre 2008 à Saguenay

Matin---------------------------------------Après-midi

La basilique Notre-Dame à Montréal

Heureusement que Montréal peut compter sur d'autres personnes que ses «politiciens» pour imaginer, faire construire et tenir loin des spéculateurs de magnifiques monuments (les spéculateurs ne songent qu'à des laideurs qui rapportent gros.)
Ici ce sont les curés héritiers du Concile de Trente qui ont fait construire la Basilique Notre-Dame de Montréal.
Ce concile -que les conciles Vatican I et Vatican II ont complètement fait disparaître afin d'« autocratiser », de « protestantiser », de « désesthétiser » et de « délatiniser » le catholicisme- était, pour ainsi dire, le concile de la beauté.

Les Pères de ce concile avaient décidé que pour mettre un terme aux progrès du protestantisme et de ses principes iconoclastes et fanatiques (les protestants sont les talibans du christianisme), il fallait convaincre et confirmer les croyants dans leur foi par la beauté de l'architecture des églises, le faste théâtral des cérémonies, la perfection et l'habileté des sculptures et des peintures et l'éclat de la musique qu'on commandait aux plus grands compositeurs.
Comme vous le constatez le contraire de Vatican II où, sous prétexte de rapprocher Dieu des fidèles, on a rendu Dieu plus vulgaire que les plus vulgaires d'entre eux, faisant fuir les autres à quadruple vitesse, ne retenant même pas les vulgaires et ne réussissant qu'à peine à conserver ceux qui, à cause de l'âge ou de la maladie, ont peur de la mort.
Comparez Notre-Dame aux églises d'à présent (ce sera difficile car on n'en construit plus à cause du manque de fidèles et on vend celles qui restent pour les transformer en condos ou en centre communautaire).
Voyez sur la photo du haut de cette note sa façade néo-gothique (de style plutôt britannique, c'est-à-dire un peu « perpendiculaire ») donnant sur la Place d'Armes (il y a le monument à Maisonneuve à droite) et voyez l'intérieur bleu et or spectaculaire dont la décoration est inspirée (parfois de manière lointaine) de celle de la Sainte-Chapelle à Paris (détail de la décoration de Notre-Dame à gauche).
Quand l'Orchestre symphonique de Montréal y tenait le Festival Mozart Plus l'été du temps de Charles Dutoit, nous y allions volontiers, malgré la chaleur parfois étouffante de la canicule (Dieu mériterait l'air climatisé), entendre résonner (et raisonner, puisque cette musique-là raisonne aussi) sous ces voûtes véritablement vouées à la beauté les plus belles musiques qui aient été créées.

Et contempler l'état d'une autre époque de la religion catholique, au moment où celle-ci savait qu'il fallait se conformer aux mystères de l'Incarnation et, par le miracle de la beauté de la matière et de la chair, amener vers l'esprit et vers le salut (qui, même s'il n'existe pas dans une autre vie, existe sur la Terre, dans l'art et dans la connaissance).


(Zoom sur le retable du maître-autel avec le Couronnement
de la Vierge en haut et la Crucifixion au milieu
)


(Cliquez les photos pour examiner
la beauté des détails de cette décoration
)

Le Beau Costume du diable

Le costume de Méphisto* (joué par John Relyea, à gauche sur la photo), dans la représentation de La Damnation de Faust du Metropolitan Opera (dont j'ai parlé ici et dont ma femme a parlé ), m'a beaucoup plu (mais vraiment beaucoup).
Ces plumes qui font office de cornes, la couleur et les plis du cuir ailleurs, quelles riches idées ! 

Ah ! Quel magnifique costume !
Tellement que moi qui, comme tous les petits Québécois de mon époque, rêvais d'être pape quand je serais grand (sans doute pour des raisons en partie vestimentaires et théâtrales aussi : ah ! cette tiare et ces gants dorés constellés de pierreries ! Ah ! cette grosse bague brillant de mille feux ! Ah ! ces ors, ces encens, ces myrrhes !), je préfèrerais maintenant être le diable -et particulièrement Méphisto- dont le costume me rendrait peut-être attirant et dont le rôle dans la société humaine me semble maintenant bien plus utile que celui du pape dont les vains et répétitifs sermons font en sorte que :


Quoiqu[e] [...] ne pouss[ant] ni grands gestes ni grands cris
[Je] ferai(s] volontiers de la terre un débris

 Et dans un bâillement avalerai[s] le monde **

Il y a dans La Damnation de Berlioz un poème de Goethe traduit par Gérard de Nerval (il est chanté par Marguerite).
Le voici car je ne voudrais pas manquer l'occasion de citer un poème de Nerval :

Le Roi de Thulé***


Il était un roi de Thulé
À qui son amante fidèle
Légua comme souvenir d'elle,
Une coupe d'or ciselé.

C'était un trésor plein de charmes
Où son amour se conservait;
À chaque fois qu'il y buvait
Ses yeux se remplissaient de larmes.

Voyant ses derniers jours venir,
Il divisa son héritage,
Mais il excepta du partage
La coupe, son cher souvenir.

Il fit à la table royale
Asseoir les barons dans sa tour;
Debout et rangée alentour,
Brillait sa noblesse loyale.

Sous le balcon grondait la mer.
Le vieux roi se lève en silence,
Il boit, frissonne, et sa main lance
La coupe d'or au flot amer!

Il la vit tourner dans l'eau noire,
La vague en s'ouvrant fit un pli,
Le roi pencha son front pâli....
Jamais on ne le vit plus boire.
* On voit pourquoi c'est une marque de chaussures.
**Inspiré de l'avant-dernière strophe d'« Au lecteur » de Baudelaire.
*** Voici le poème de Goethe :

Es war ein König in Thule

Es war ein König in Thule,
Gar treu bis an das Grab,
Dem sterbend seine Buhle
Einen goldnen Becher gab.

Es ging ihm nichts darüber,
Er leert' ihn jeden Schmaus;
Die Augen gingen ihm über,
So oft er trank daraus.

Und als er kam zu sterben,
Zählt' er seine Städt' im Reich,
Gönnt' alles seinem Erben,
Den Becher nicht zugleich.

Er saß beim Königsmahle,
Die Ritter um ihn her,
Auf hohem Vätersaale,
Dort auf dem Schloß am Meer.

Dort stand der alte Zecher,
Trank letzte Lebensglut,
Und warf den heil'gen Becher
Hinunter in die Flut.

Er sah ihn stürzen, trinken
Und sinken tief ins Meer.
Die Augen täten ihm sinken
Trank nie einen Tropfen mehr.

dimanche 23 novembre 2008

Température du 23 novembre 2008 à Saguenay

Matin---------------------------------------Après-midi

«Parents et amis sont invités à y assister» du Théâtre CRI


J'ai vu une superbe représentation théâtrale vendredi (29 novembre dernier), l'une des meilleures représentations que j'ai vues depuis très longtemps (peut-être dans ma vie si je prends en considération seulement l'impact qu'elle a eu en moi).
C'était «Parents et amis sont invités a y assister», adapté du texte de Hervé Bouchard.
Par le Théâtre CRI (informations ici et ) au Centre culturel de Jonquière (voir la reproduction de l'affiche ci-dessus).

Superbe (oui, je pourrais remplacer cet adjectif par remarquable, exceptionnel, indescriptible, ineffable, indicible, formidable, magnifique, fabuleux, merveilleux, sublime, divin, super, et j'en passe et j'en passe, il n'y a qu'à consulter le si utile Thésaurus de Larousse mais je répète, et je vais utiliser encore, cet adjectif, car il signifie tous ceux-là), superbe texte donc, dans une superbe mise en scène, porté par de superbes acteurs.
Qu'importe (pour moi) l'anecdote (la mort d'un père), le texte devenu parole (et corps et voix et gestes) surgit comme des geysers et déferle comme des torrents de la bouche et du corps (le théâtre, paroles du corps) de ces jeunes gens, et vient sortir de leur gangue, bouger, entraîner dans leurs flots, faire luire des pierres de mémoire depuis longtemps enfouies en moi comme en tous les spectateurs, mais davantage dans les spectateurs qui ont, comme moi, passé leur enfance et leur jeunesse dans l'ouest de Saguenay, dans ce qui était autrefois Arvida, Kénogami et Jonquière. Tant de nostalgie!
Cela existe à nouveau tout à coup par la magie (le miracle?) des glossolalies, des sons, des mots, des phrases et de la si superbe représentation.
Cela avait existé aussi dans le livre d'Hervé Bouchard.
Quand je lis les «critiques» de Michel Bélair dans Le Devoir qui, sans jamais sortir de Montréal parle du «désert culturel» des régions du Québec, j'éprouve des frissons de plaisir à voir ce que jamais il ne verra (verra-t-il jamais quelque chose cet aveugle volontaire qui préfère écumer la province française -comptes de dépenses plus conséquents- plutôt que de parcourir son propre pays dont il parle vraiment «à travers son chapeau»?).
Pour rendre hommage aux magiciens (thaumaturges?), j'ai numérisé et colorisé les photos photocopiées qu'il y avait dans le programme de la représentation (j'en aime les imperfections). J'espère qu'ils me pardonneront de les avoir ainsi verdis, bleuis, brunis, rougis, jaunis, etc. J'ai ainsi colorisé Apollinaire et Queneau.
De haut en bas: sous l'affiche, Hervé Bouchard (sa photo n'a pas été numérisée par moi, je l'ai prise sur Internet), colonne de gauche, Guylaine Rivard (metteur en scène), Jérémie Desbiens, Monique Gauvin, Martin Giguère, Josée Laporte, Anne Laprise, Dany LeFrançois, Marc-André Perrier (les comédiennes et comédiens sont classé(e)s par ordre alphabétique des noms).
Les crédits du spectacle sont .
Ma femme -une vraie critique, elle- est aussi enthousiaste que moi .
Vous voulez voir mon billet?