Ce portrait de James Joyce, à gauche de l'image, par Jacques-Émile Blanche (mieux réussi à mon sens que celui que Blanche a peint de Marcel Proust) se trouve au « National Portrait Gallery » de Londres.
De Londres. Je souligne « de Londres ».
Est-ce que les Britanniques considèrent vraiment James Joyce comme un « national », un membre de leur nation (si tant est qu'ils en forment une, avec les Écossais, les Gallois, et les Irlandais qu'il leur reste), comme un Britannique ?
Car le « National Portrait Gallery » réunit en principe les portraits de toutes les gloires de la Grande-Bretagne.
James Joyce était un Irlandais.
Il est vrai qu'à l'époque de sa naissance, à l'époque où il écrit « Ulysse » (et même ses autres œuvres), l'Irlande fait encore partie de la Grande-Bretagne et que son peuple est alors soumis au génocide anglais depuis huit ou neuf siècles.
(« Ulysse » est publié à la veille de l'indépendance de l'Irlande)
Génocide réussi parce que, désormais, les Irlandais parlent anglais (avec un accent particulier mais chaque région de l'Angleterre a aussi un accent particulier) et considèrent sans doute l'anglais comme leur langue nationale (ils prétendent aimer l'irlandais, presque disparu, mais ils l'aiment platoniquement, ne le parlent pas et s'ennuient à le parler).
Mais personne n'est moins britannique que Joyce. Nul n'est plus irlandais.
Je ne sais pas s'il aurait apprécié de voir son portrait à la « National Portrait Gallery » de Londres, comme s'il appartenant à la nation britannique.
C'est comme s'il y avait à cette « Gallery » le portrait d'Émile Nelligan, sous prétexte qu'à l'époque où celui-ci est né le Québec faisait partie de l'Empire britannique.
(Évidemment c'est peu probable puisque Nelligan -quoique d'origine paternelle irlandaise- écrivait en français -le génocide n'a pas encore été réussi au Québec-, mais remplacez son nom par celui de Stephen Leacock par exemple, le parallèle sera plus parlant).
Quoi qu'il en soit, Joyce trouvait que l'anglais était une langue difficile à écrire pour lui et je ne suis pas sûr que ce soit seulement pour des raisons linguistiques.
C'est ce qu'il dit dans cette citation que je lui ai attachée dans un phylactère ci-haut que l'on pourrait traduire ainsi: « Écrire en anglais est la plus ingénieuse torture que l'on ait imaginée pour punir les péchés commis dans des vies antérieures ».
Ses souffrances n'étaient pas que linguistiques.
Et je dois ajouter que le traitement qu'il a imposé à l'anglais dans ses œuvres l'a probablement vengé des tortures que l'anglais lui a infligées.
Et peut-être, en partie, ce traitement a-t-il vengé les souffrances que les Anglais ont infligées à son peuple pendant tant de siècles.
Pas suffisamment à mon gré, car celui qui combat par l'épée doit périr par l'épée.
De Londres. Je souligne « de Londres ».
Est-ce que les Britanniques considèrent vraiment James Joyce comme un « national », un membre de leur nation (si tant est qu'ils en forment une, avec les Écossais, les Gallois, et les Irlandais qu'il leur reste), comme un Britannique ?
Car le « National Portrait Gallery » réunit en principe les portraits de toutes les gloires de la Grande-Bretagne.
James Joyce était un Irlandais.
Il est vrai qu'à l'époque de sa naissance, à l'époque où il écrit « Ulysse » (et même ses autres œuvres), l'Irlande fait encore partie de la Grande-Bretagne et que son peuple est alors soumis au génocide anglais depuis huit ou neuf siècles.
(« Ulysse » est publié à la veille de l'indépendance de l'Irlande)
Génocide réussi parce que, désormais, les Irlandais parlent anglais (avec un accent particulier mais chaque région de l'Angleterre a aussi un accent particulier) et considèrent sans doute l'anglais comme leur langue nationale (ils prétendent aimer l'irlandais, presque disparu, mais ils l'aiment platoniquement, ne le parlent pas et s'ennuient à le parler).
Mais personne n'est moins britannique que Joyce. Nul n'est plus irlandais.
Je ne sais pas s'il aurait apprécié de voir son portrait à la « National Portrait Gallery » de Londres, comme s'il appartenant à la nation britannique.
C'est comme s'il y avait à cette « Gallery » le portrait d'Émile Nelligan, sous prétexte qu'à l'époque où celui-ci est né le Québec faisait partie de l'Empire britannique.
(Évidemment c'est peu probable puisque Nelligan -quoique d'origine paternelle irlandaise- écrivait en français -le génocide n'a pas encore été réussi au Québec-, mais remplacez son nom par celui de Stephen Leacock par exemple, le parallèle sera plus parlant).
Quoi qu'il en soit, Joyce trouvait que l'anglais était une langue difficile à écrire pour lui et je ne suis pas sûr que ce soit seulement pour des raisons linguistiques.
C'est ce qu'il dit dans cette citation que je lui ai attachée dans un phylactère ci-haut que l'on pourrait traduire ainsi: « Écrire en anglais est la plus ingénieuse torture que l'on ait imaginée pour punir les péchés commis dans des vies antérieures ».
Ses souffrances n'étaient pas que linguistiques.
Et je dois ajouter que le traitement qu'il a imposé à l'anglais dans ses œuvres l'a probablement vengé des tortures que l'anglais lui a infligées.
Et peut-être, en partie, ce traitement a-t-il vengé les souffrances que les Anglais ont infligées à son peuple pendant tant de siècles.
Pas suffisamment à mon gré, car celui qui combat par l'épée doit périr par l'épée.
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