mardi 12 janvier 2010

L'orateur de Madame

On le voit venir le «monseigneur» Bossuet: s'il manque toujours une pièce au bonheur humain tant ces pièces sont nombreuses, il compte nous proposer l'improbable bonheur divin, à condition que l'on confie nos petites mauvaises pensées et nos petits mauvais désirs («mauvaises» et «mauvais» selon lui et la doctrine de son Église) à quelqu'un de sans doute aussi mauvais que nous et qui s'en repaîtra.
Lui qui transformait une gourgandine princesse Stuart franco-anglaise* en une «Madame se meurt, Madame est morte, Madame a passé comme l'herbe des champs...**» en utilisant toutes les ressources de l'art oratoire pour diviniser ainsi quelqu'un qui ne le méritait pas plus que vous et moi.
Et lui qui justifiait l'esclavage*** en s'appuyant sur les épîtres de saint Paul (et sur le
Saint-Esprit), montrant ainsi l'inanité de ces épîtres et de toute la doctrine qui s'est édifiée sur elles (ainsi que de toutes les Églises qui ont adopté cette doctrine).
Je pense qu'il peut garder pour lui le bonheur divin qu'il nous offre, si toutefois, avec ses théories, il peut aspirer à le posséder.

* Il s'agit d'Henriette d'Angleterre, vous l'avez deviné.
** Dans l'«Oraison funèbre d'Henriette d'Angleterre».
Voici une citation plus complète et plus exacte que celle que je fais: «Madame a passé du matin au soir ainsi que l'herbe des champs. Le matin, elle fleurissait, avec quelles grâces, vous le savez; le soir, nous la vîmes séchée!».
Bossuet était un grand écrivain.
*** Voici cette justification: «De condamner cet état [l'esclavage], ce serait non seulement condamner le droit des gens, où la servitude est admise, comme il paraît par toutes les lois; mais ce serait condamner le Saint-Esprit, qui ordonne aux esclaves, par la bouche de saint Paul, de demeurer en leur état, et n'oblige point leurs maîtres à les affranchir».
Remarquez cette attribution des paroles de saint Paul au Saint-Esprit. Quelle horreur a dû en ressentir le pauvre Saint-Esprit (si tant est qu'il existe une telle chose)!
Bossuet était un bien médiocre penseur.
Cette médiocrité est celle de tous les penseurs qui s'appuient sur un livre ou des écrits prétendument dictés par un Dieu et, donc, intangibles.
Quand celui qui a véritablement écrit le livre attribué à Dieu est stupide c'est Dieu qui passe pour stupide, ainsi que ceux qui croient dans le livre.

1 commentaire:

atalante a dit…

Tout de même, cette pensée de Bossuet sur le bonheur me semble belle..et vrai. Même hors contexte.

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