lundi 31 mars 2008

Coventry, Desde, loi du talion

Il y a une rue de Coventry près de chez moi, vous allez bientôt savoir pourquoi.
Je viens d'apprendre que c'est à Coventry, en Angleterre, qu'on fabrique les Jaguars car Ford vient de vendre cette compagnie à Tata, la compagnie indienne.
Ford avait jadis acheté Jaguar comme on se paie une maîtresse coûteuse (ou un amant coûteux, ne soyons pas sexiste), pour en tirer du prestige ( ? ).
La rue de Coventry ne doit pas son nom à cela même si d'autres noms de rue d'Arvida doivent leur nom à des motifs aussi vulgaires que de rappeler le nom d'un président de compagnie étasunien (Davis, Mellon, etc.)
La rue s'appelle « de Coventry » parce que les Allemands avaient quasi rasé cette ville durant la dernière Grande Guerre (peut-être y fabriquait-on des moteurs de Spitfire dans les usines Jaguar). Arvida appuyait fortement les Alliés, surtout les Anglais, pendant cette guerre.
Les Anglais et autres Alliés se sont vengés en rasant Dresde mais aucune rue d'Arvida ne s'appelle « rue de Dresde »: la destruction de Dresde était pourtant plus regrettable que celle de Coventry -qui était elle-même inexcusable.

Mais les Anglais appliquaient la loi du talion, comme les Israéliens l'appliquent aujourd'hui car c'est ce que la Bible leur enjoint de faire.
Cette loi est inique même si on l'attribue à Yahvé.
Reste que le spectacle de la cathédrale gothique Saint-Michel de
Coventry rasée presque jusqu'au sol est d'une infinie tristesse.
J'imagine que les ruines de Dresde seraient (étaient ?) également d'une infinie tristesse.
Il y a une cathédrale moderne à côté. Et un très bel archange saint Michel , en train de vaincre un très beau Satan

Je ne sais pas si ce combat a quelque chose à voir avec les bombardements de Coventry et de Dresde.
Sans doute.
Les voici, ils sont de Jacob Epstein :


Et voici « Les Litanies de Satan », tirées des Fleurs du Mal de Charles Baudelaire qui n'ont presque rien à voir mais que je vous présente parce que je les aime bien -peut-être parce que la haine de Dieu envers Satan -qu'il a lui-même créé, car s'il existe il a tout créé même le mal, même le dieu du mal- cette haine me semble aussi injuste que le bombardement de Coventry et le bombardement-vengeance de Dresde.
Après avoir lu ces litanies vous comprendrez un peu mieux pourquoi, jusqu'en 1960, les évêques du Québec désiraient que Les Fleurs du Mal soient reléguées dans l'« enfer » des bibliothèques et ne soient lues par personne :

Les Litanies de Satan

Ô toi, le plus savant et le plus beau des Anges,
Dieu trahi par le sort et privé de louanges,

 

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère !
 

Ô Prince de l’exil, à qui l’on a fait tort, 
Et qui, vaincu, toujours te redresses plus fort,
 

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère !

Toi qui sais tout, grand roi des choses souterraines,
Aimable médecin des angoisses humaines,

 

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère !
 

Qui même aux parias, ces animaux maudits, 
Enseignes par l’amour le goût du Paradis,
 

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère !
 

Ô toi, qui de la Mort, ta vieille et forte amante,
Engendras l’Espérance, — une folle charmante !

 

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère !
 

Toi qui peux octroyer ce regard calme et haut 
Qui damne tout un peuple autour d’un échafaud,
 

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère !
 

Toi qui sais en quels coins des terres envieuses
Le Dieu jaloux cacha les pierres précieuses,

 

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère !
 

Toi dont l’œil clair connaît les secrets arsenaux 
Où dort enseveli le peuple des métaux,
 

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère !


Toi dont la large main cache les précipices
Au somnambule errant au bord des édifices,

 

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère !
 

Toi qui frottes de baume et d’huile les vieux os 
De l’ivrogne attardé foulé par les chevaux,
 

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère !
 

Toi qui, pour consoler l’homme frêle qui souffre,
Nous appris à mêler le salpêtre et le soufre,

 

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère !
 

Toi qui mets ton paraphe, ô complice subtil, 
Sur le front du banquier impitoyable et vil,
 

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère !
 

Toi qui mets dans les yeux et dans le cœur des filles
Le culte de la plaie et l’amour des guenilles !

 

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère !
 

Bâton des exilés, lampe des inventeurs, 
Confesseur des pendus et des conspirateurs,
 

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère !


Père adoptif de ceux qu’en sa noire colère
Du paradis terrestre a chassés Dieu le Père,


Ô Satan, prends pitié de ma longue misère !


Gloire et louage à toi, Satan, dans les hauteurs
Du Ciel, où tu régnas, et dans les profondeurs
De l’Enfer où, fécond, tu couves le silence !
Fais que mon âme un jour, sous l’Arbre de Science,
Près de toi se repose, à l’heure où sur ton front
Comme un Temple nouveau ses rameaux s’épandront !

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