Parlant des «Mémoires de guerre» du général de Gaulle, voici comment (ici) Raphaël Sorin présente (et fait part de son admiration pour elle) l'analyse que Jacques Mercanton fait de l'utilisation d'une virgule dans le compte rendu du général de sa dernière rencontre avec le maréchal Pétain (il était encore maréchal à cette époque où il n'avait pas trahi son pays).
[...] Quant à ce qui concerne Pétain, son point de vue [celui de Jacques Mercanton] est tout simplement formidable. Il devrait servir de modèle à une future explication de texte. De Gaulle rappelle leur dernière rencontre à Bordeaux, à l’Hôtel Splendid: «Au Maréchal, qui dînait dans la même salle, j’allai en silence adresser mon salut. Il me serra la main, sans un mot. Je ne devais plus le revoir, jamais». Et Mercanton de s’arrêter sur cette dernière virgule, qui isole le mot «jamais». «C’est elle qui donne tout son poids au mot et marque le sens de cet adieu. Qu’on la supprime, la phrase prend un caractère banal, ne rapporte plus qu’une circonstance ou un hasard. Grâce à elle, elle a une sonorité fatidique, qui suggère la force de l’événement qui va faire de ces deux hommes des adversaires, sans merci.
C'est ce qu'on pourrait appeler une virgule fatale.
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