Le théâtre de l'Antiquité était une affaire d'hommes car les acteurs étaient du sexe masculin, même quand ils devaient jouer des rôles de femmes, et le public, je le crois, même si la discussion est encore ouverte à ce sujet, était lui aussi composé d'hommes exclusivement ou majoritairement (quelques vestales ou grandes prêtresses constituaient l'exception).
Les femmes grecques étaient confinées au gynécée, comme les femmes musulmanes le sont encore aujourd'hui (dans une partie de la maison qui ne s'appelle plus « gynécée » mais en joue le rôle).
On était donc entre hommes (comme à la taverne au Québec jusqu'aux années 80) et on pouvait pour cette raison s'autoriser l'usage de tous les gros mots.
Les mots considérés comme les plus vulgaires étaient permis.
Parler des fonctions corporelles les plus « basses », de leur bon ou mauvais fonctionnement, de leurs « odeurs » et autres consistances, était habituel.
Pas de (réputées) chastes oreilles.
Cela vaut, naturellement, pour le théâtre comique.
Le langage de la tragédie était plus châtié.
Aristophane ne manquait pas de sacrifier avec enthousiasme à la coutume et de surenchérir sur elle avec un génie suprême de l'invention et de la moquerie.
J'ai pu le constater lors de la représentation de « L'Assemblée des femmes » donnée par le Théâtre 100 Masques à Chicoutimi dimanche dernier.
(Aristophane trouve le moyen d'y ridiculiser le communisme et les femmes qui veulent l'implanter, entre autres choses, aussi bien que le petit esprit, l'égoïsme et l'indécrottable vulgarité des hommes et des laides et vieilles parmi les femmes).
Seulement voilà : dans cette représentation tous les rôles étaient joués par des femmes.
La manière antique était inversée.
Même au Québec on n'est pas (encore) habitué d'entendre des mots grossiers, scatologiques, sortir de la bouche de femmes.
Même si Thierry Ardisson, le directeur de Paris-Match et consorts trouvent que les Québécoises sont mal embouchées.
Ces gros mots reprennent donc toutes leurs forces et celles-ci sont considérables.
On rit donc beaucoup à cette représentation, et parfois jaune.
Jaune très foncé.
Les excellentes interprètes sentent bien que ce vocabulaire ne convient pas à des femmes et même quand elles jouent le rôle de femmes elles sentent le besoin de grossir leur voix, comme pour la rapprocher d'une voix d'homme.
Seule voix à laquelle convient ce vocabulaire.
C'est encore plus drôle : elles doivent ainsi rendre la monnaie de leur pièce aux acteurs masculins antiques qui devaient minauder et prendre une voix haut perchée en jouant leurs rôles de femmes.
C'est une autre des nombreuses bonnes idées de mise en scène de Dario Larouche (avec, par exemple, les pénis mous dont sont dotés les « hommes » que ceux-ci manipulent avec allégresse (comme dans la réalité), les colonnes doriques rigides que l'on manipule également avec allégresse (ce sont les « femmes » qui le font et on comprend pourquoi), les barbes que l'on traite parfois comme des serviettes ou des papiers de toilette, etc.)
P.S. Éclairante critique de Denise Pelletier ici.
Les femmes grecques étaient confinées au gynécée, comme les femmes musulmanes le sont encore aujourd'hui (dans une partie de la maison qui ne s'appelle plus « gynécée » mais en joue le rôle).
On était donc entre hommes (comme à la taverne au Québec jusqu'aux années 80) et on pouvait pour cette raison s'autoriser l'usage de tous les gros mots.
Les mots considérés comme les plus vulgaires étaient permis.
Parler des fonctions corporelles les plus « basses », de leur bon ou mauvais fonctionnement, de leurs « odeurs » et autres consistances, était habituel.
Pas de (réputées) chastes oreilles.
Cela vaut, naturellement, pour le théâtre comique.
Le langage de la tragédie était plus châtié.
Aristophane ne manquait pas de sacrifier avec enthousiasme à la coutume et de surenchérir sur elle avec un génie suprême de l'invention et de la moquerie.
J'ai pu le constater lors de la représentation de « L'Assemblée des femmes » donnée par le Théâtre 100 Masques à Chicoutimi dimanche dernier.
(Aristophane trouve le moyen d'y ridiculiser le communisme et les femmes qui veulent l'implanter, entre autres choses, aussi bien que le petit esprit, l'égoïsme et l'indécrottable vulgarité des hommes et des laides et vieilles parmi les femmes).
Seulement voilà : dans cette représentation tous les rôles étaient joués par des femmes.
La manière antique était inversée.
Même au Québec on n'est pas (encore) habitué d'entendre des mots grossiers, scatologiques, sortir de la bouche de femmes.
Même si Thierry Ardisson, le directeur de Paris-Match et consorts trouvent que les Québécoises sont mal embouchées.
Ces gros mots reprennent donc toutes leurs forces et celles-ci sont considérables.
On rit donc beaucoup à cette représentation, et parfois jaune.
Jaune très foncé.
Les excellentes interprètes sentent bien que ce vocabulaire ne convient pas à des femmes et même quand elles jouent le rôle de femmes elles sentent le besoin de grossir leur voix, comme pour la rapprocher d'une voix d'homme.
Seule voix à laquelle convient ce vocabulaire.
C'est encore plus drôle : elles doivent ainsi rendre la monnaie de leur pièce aux acteurs masculins antiques qui devaient minauder et prendre une voix haut perchée en jouant leurs rôles de femmes.
C'est une autre des nombreuses bonnes idées de mise en scène de Dario Larouche (avec, par exemple, les pénis mous dont sont dotés les « hommes » que ceux-ci manipulent avec allégresse (comme dans la réalité), les colonnes doriques rigides que l'on manipule également avec allégresse (ce sont les « femmes » qui le font et on comprend pourquoi), les barbes que l'on traite parfois comme des serviettes ou des papiers de toilette, etc.)
P.S. Éclairante critique de Denise Pelletier ici.
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