vendredi 20 février 2009

Musique facile où se love le souvenir

En m'abonnant au Club de disques Columbia (il n'existe plus que sous la forme d'un site électronique) au début de mon adolescence, je comptais bien m'initier à tous les genres de musique qui n'avaient pas fait partie de mon enfance, c'est-à-dire essentiellement la musique classique et le jazz.
Mais à l'intérieur de la musique classique, il y avait de la musique considérée comme difficile -c'est-à-dire qu'elle jouissait d'un haut degré d'appréciation mondaine- et de la musique considérée comme facile, celle que jouait Liberace (voyez-le dans toute sa splendeur à droite)
chaque semaine à l'émission états-unienne (en direct de Los Angeles je crois) où il conquérait avec facilité de vieilles dames qui ne lui importaient guère (non plus que n'importe quelle dame, on l'a appris plus tard) en massacrant Tchaïkovski, Rachmaninov (les pièces vraiment faciles), Chopin et autres Rossini ou Pachelbel.
Car il les massacrait allègrement, je m'en suis aperçu plus tard en réécoutant certaines de ses rapidissimes interprétations qu'on présentait en faisant sa biographie à l'une des chaînes télévisuelles spécialisées qui, pour épuiser leur temps d'antenne, parlent de n'importe qui: il échappait presque toutes les notes pour terminer les pièces dans les temps que les annonces commerciales lui permettaient de leur consacrer.
J'avais donc acquis Les Variations Goldberg, Water Music (que Liberace n'avait pas la capacité de jouer) et Le Lac des cygnes de Tchaïkovski dont il jouait parfois -en deux ou trois secondes- deux ou trois portées, ne manquant pas de faire perler une larme au coin de l'oeil sur-maquillé de ses admiratrices. Je ne sais pas si elles déploraient le massacre ou appréciaient l'air et les mines de l'interprète.
Cette musique était considérée comme facile et on ne pouvait pas se vanter de la connaître ou, du moins, de l'apprécier.
Mais elle a quand même capturé et conservé en elle une partie de ma jeunesse.
Nos souvenirs ne prennent pas garde à l'appréciation que les gens formulent des choses, ils se lovent dans n'importe laquelle, où nous les retrouvons avec surprise et avec bonheur un jour ou l'autre si le destin a décidé de nous favoriser.
Voici deux pièces du Lac des cygnes qui a été présenté pour la première fois (l'échec a été total) aujourd'hui (selon le calendrier julien toujours en vigueur à l'époque chez les tsars), en 1877, à Moscou.
La première est le «pas de quatre» des petits cygnes dansé par le ballet du Théâtre Bolchoï à Moscou (là où le ballet a été présenté pour la première fois en 1877).


La deuxième est la célèbre valse présentée dans le film «Anna Karénine» (page en anglais au bout de ce lien), tourné en 1991.

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