C'est une photo qui date d'un siècle.
Elle est prise à partir du sommet de l'Arc de triomphe à Paris.
L'avenue qui s'étend sous nos yeux est l'avenue Kléber qui porte encore aujourd'hui le nom qu'elle portait avant 1914, contrairement à l'avenue Foch, par exemple, qui, à l'époque, et depuis 1875, et, surtout, dans «À la recherche du temps perdu», portait le nom de l'«Avenue du Bois».
(Les noms des choses qui apparaissent dans une grande œuvre ne devraient jamais être modifiés.)
Le bâtiment bizarre que vous apercevez au loin à gauche est disparu depuis longtemps, avant 1937, comme les personnages que nous voyons de dos ou de trois-quarts sur le sommet de l'Arc, et il a été remplacé par le Palais de Chaillot.
C'est le Palais du Trocadéro.
Je ne pense pas que le Palais du Trocadéro ait été vraiment beau ou intéressant au point de vue architectural mais au point de vue littéraire il est irremplaçable car c'est dans ses jardins qu'Albertine, l'aimée du narrateur dans «La Recherche», allait rencontrer ses amantes ou ses maîtresses à l'insu de son amant.
Albertine, source de tant de souffrances, dans les jardins du Trocadéro!
Sur cette photo, le palais est comme un personnage de roman qu'on peut enfin voir, qui a existé hors de son roman et qui est disparu, comme les autres personnages une fois qu'on a refermé le livre où ils apparaissaient.
Reste encore au moins, de la photo, un lieu qui existe hors d'elle et qui, pour toujours (tant du moins qu'il existera), permet d'imaginer le palais à jamais disparu: le sommet de l'Arc qui fait face à l'avenue Kléber.
Le voici vu d'en bas, de l'avenue Kléber il y a un an ou deux, que je peux vous présenter grâce à Google Street View:
samedi 3 septembre 2011
Fantôme
heure 00:10:00
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