Jules César a été assassiné aujourd'hui, il y a 2055 ans, le jour des Ides de mars.
Au cours de la journée, je mettrai ici le récit de cette mort par Suétone.
Voici le texte promis, en français d'abord, puis le texte original latin:
Lorsqu'il [César] s'assit, les conjurés l'entourèrent, sous prétexte de lui présenter leurs hommages. Tout à coup Tillius Cimber, qui s'était chargé du premier rôle, s'approcha davantage comme pour lui demander une faveur ; et César se refusant à l'entendre et lui faisant signe de remettre sa demande à un autre temps, il le saisit, par la toge, aux deux épaules. " C'est là de la violence, " s'écrie César; et, dans le moment même, l'un des Casca, auquel il tournait le dos, le blesse, un peu au-dessous de la gorge.
César, saisissant le bras qui l'a frappé, le perce de son poinçon, puis il veut s'élancer; mais une autre blessure l'arrête, et il voit bientôt des poignards levés sur lui de tous côtés. Alors il s'enveloppe la tête de sa toge, et, de la main gauche, il en abaisse en même temps un des pans sur ses jambes, afin de tomber plus décemment, la partie inférieure de son corps étant ainsi couverte.
Il fut ainsi percé de vingt-trois coups : au premier seulement, il poussa un gémissement, sans dire une parole. Toutefois, quelques écrivains rapportent que, voyant s'avancer contre lui Marcus Brutus, il dit: « και συ τεκνον* » Quand il fut mort, tout le monde s'enfuit, et il resta quelque temps étendu par terre. Enfin trois esclaves le rapportèrent chez lui sur une litière, d'où pendait un de ses bras.
Texte original
Assidentem conspirati specie officii circumsteterunt, ilicoque Cimber Tillius, qui primas partes susceperat, quasi aliquid rogaturus propius accessit renuentique et gestu in aliud tempus differenti ab utroque umero togam adprehendit: deinde clamantem: "Ista quidem uis est!" alter e Cascis auersum uulnerat paulum infra iugulum.
Caesar Cascae brachium arreptum graphio traiecit conatusque prosilire alio uulnere tardatus est; utque animaduertit undique se strictis pugionibus peti, toga caput obuoluit, simul sinistra manu sinum ad ima crura deduxit, quo honestius caderet etiam inferiore corporis parte uelata.
Atque ita tribus et uiginti plagis confossus est uno modo ad primum ictum gemitu sine uoce edito, etsi tradiderunt quidam Marco Bruto irruenti dixisse: kai su teknon; exanimis diffugientibus cunctis aliquamdiu iacuit, donec lecticae impositum, dependente brachio, tres seruoli domum rettulerunt.
* Transcription en alphabet latin à partir de l'alphabet grec: « kai su teknon »; en français: « Et toi aussi mon enfant ? ».
Cette dernière parole de César en grec montre la pénétration de la langue grecque dans l'élite romaine. Mais il faut voir cette parole dans son contexte : César fait en sorte d'arranger sa toge au moment même où il reçoit les coups mortels, dit Suétone, afin d'être décent quand il sera tombé et puis il dit cette parole en grec.
En réalité César met en scène sa propre mort afin que celle-ci soit digne de celle des héros grecs qu'il admire, ceux d'Homère notamment, mais qu'elle soit digne aussi de la mort d'Alexandre qu'il admirait tant. Il fait en sorte que sa mort soit celle d'un dieu, et un dieu ne peut être que grec.
Les chrétiens (nom d'origine grecque) ont eux aussi transformé le juif Jésus en dieu grec en l'appelant Jésus-Christ (« Christ », du grec « χριστός »), et en camouflant pendant deux millénaires qu'il était circoncis, marque de son appartenance à la religion juive, la même que les Juifs pratiquent encore aujourd'hui, la véritable religion de Jésus.
Puissé-je, moi aussi, avoir suffisamment de fierté et de maîtrise de moi pour être comme César capable de mettre ainsi ma mort en scène!
2 commentaires:
si je me souviens bien, César s'est détourné de ptoémée car il avait assassiné son ennemi Pompée traitreusement.Quels qu' aient été ses vices,il méritait une mort plus honorable.
J'ai des sentiments mitigés à l'égard de César, comme à l'égard de tout homme politique.
Évidemment il a eu une grande influence sur nos vies à nous: c'est à cause de lui, par exemple, que vous et moi parlons un dialecte latin plutôt qu'un dialecte celte, et pour arriver à cela il a massacré un tiers de la population de la Gaule.
Je suis mieux disposé à l'égard de son neveu Octave.
Mais c'était un écrivain, et son latin est presque du français tant il est facile à lire.
Je fais état de sa mort surtout à cause de cela et à cause des conséquences littéraires qu'elle a eues (pièce de Shakespeare, etc.)
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