Un extrait d'un article de Books (ici) sur la puissance de la métaphore, et du langage.
Ces métaphores qui nous gouvernent
Ils peuvent exprimer des abstractions, mais aussi manipuler l’opinion… Quand leur usage est métaphorique, les mots deviennent des instruments de pouvoir. Parler de « réfugiés fiscaux » pour décrire les riches qui se dérobent à l’impôt mais de « raz de marée » à propos des véritables réfugiés, cela n’a rien d’anodin.
L’ennemi n’avait pas de visage. C’était un fantôme qui tuait par traîtrise. Le médecin Robert Koch fut le premier à le reconnaître : l’humanité était en guerre. Cet ennemi, c’était l’armée des bactéries, les agents pathogènes de la maladie du charbon, de la tuberculose et du choléra. On ne pouvait pas les voir. Mais Koch fit en sorte que la menace saute désormais aux yeux de tout le monde. Il parla d’« intrus », mit en garde contre les « invasions » et appela à une « offensive » au moyen d’« armes » puissantes. Du point de vue sémantique, le fondateur de la bactériologie n’évoluait pas dans un laboratoire, mais sur un champ de bataille.
Aujourd’hui, il est courant de comparer les maladies infectieuses à des combattants ennemis. Mais, à l’époque de Robert Koch, cette métaphore était inhabituelle.
[…]
La langue est un instrument de pouvoir. La manière dont chacun désigne les choses – un ennemi, un projet, un produit – contribue à déterminer ce que les autres en pensent. En retour, tout individu est manipulé, au quotidien, par les mots ; ceux des hommes politiques, des publicitaires, des journalistes et des juristes ; ceux des collègues et des proches. Nous avons conscience de cette puissance de la langue, sans pouvoir nous y soustraire pour autant. Ce que Robert Koch sentait intuitivement, des études de psychologie sociale et de psycholinguistique le confirment aujourd’hui : les mots ne servent pas seulement à véhiculer des informations. Ils éveillent des attentes et des souvenirs, ils influencent nos jugements et nos décisions, ils recréent le monde dans notre esprit. Et le résultat peut étonnamment vite se dissocier de la réalité.
Ces métaphores qui nous gouvernent
Ils peuvent exprimer des abstractions, mais aussi manipuler l’opinion… Quand leur usage est métaphorique, les mots deviennent des instruments de pouvoir. Parler de « réfugiés fiscaux » pour décrire les riches qui se dérobent à l’impôt mais de « raz de marée » à propos des véritables réfugiés, cela n’a rien d’anodin.
L’ennemi n’avait pas de visage. C’était un fantôme qui tuait par traîtrise. Le médecin Robert Koch fut le premier à le reconnaître : l’humanité était en guerre. Cet ennemi, c’était l’armée des bactéries, les agents pathogènes de la maladie du charbon, de la tuberculose et du choléra. On ne pouvait pas les voir. Mais Koch fit en sorte que la menace saute désormais aux yeux de tout le monde. Il parla d’« intrus », mit en garde contre les « invasions » et appela à une « offensive » au moyen d’« armes » puissantes. Du point de vue sémantique, le fondateur de la bactériologie n’évoluait pas dans un laboratoire, mais sur un champ de bataille.
Aujourd’hui, il est courant de comparer les maladies infectieuses à des combattants ennemis. Mais, à l’époque de Robert Koch, cette métaphore était inhabituelle.
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La langue est un instrument de pouvoir. La manière dont chacun désigne les choses – un ennemi, un projet, un produit – contribue à déterminer ce que les autres en pensent. En retour, tout individu est manipulé, au quotidien, par les mots ; ceux des hommes politiques, des publicitaires, des journalistes et des juristes ; ceux des collègues et des proches. Nous avons conscience de cette puissance de la langue, sans pouvoir nous y soustraire pour autant. Ce que Robert Koch sentait intuitivement, des études de psychologie sociale et de psycholinguistique le confirment aujourd’hui : les mots ne servent pas seulement à véhiculer des informations. Ils éveillent des attentes et des souvenirs, ils influencent nos jugements et nos décisions, ils recréent le monde dans notre esprit. Et le résultat peut étonnamment vite se dissocier de la réalité.
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