vendredi 19 novembre 2010

Longtemps, longtemps...

Le regard halluciné de Nelligan
enfermé depuis 40 ans

Voici ce que je dois commémorer aujourd'hui puisque la panne de réseau dont j'ai parlé dans le billet précédent m'a empêché de le faire hier:
le 18 novembre, selon Wikipédia, est le jour de la mort de trois écrivains:

1922 : Marcel Proust, écrivain français (né le 10 juillet 1871);
1941 :Émile Nelligan, poète québécois (né le 24 décembre 1879);
1952 : Paul Éluard, poète français (né le 14 décembre 1895).

J'ai souvent cité
Proust et Éluard, peu Nelligan, pourtant à l'origine de la modernisation de la poésie québécoise et de son entrée dans le lyrisme personnel.
Voici donc un poème de Nelligan qui épouse la forme d'un rondel, oubliée depuis Clément Marot et reprise par les Symbolistes (ces résurrections de formes me plaisent bien car souvent la création réside dans la résurrection).
Deux rimes, trois quatrains, un monostiche; répétition des deux premiers à la fin du deuxième quatrain et du premier vers à la fin (avec éventuelle variation) en guise de monostiche:

Clair de lune intellectuel

Ma pensée est couleur de lumières lointaines,

Du fond de quelque crypte aux vagues profondeurs.

Elle a l'éclat parfois des subtiles verdeurs 

D'un golfe où le soleil abaisse ses antennes. 



En un jardin sonore, au soupir des fontaines, 

Elle a vécu dans les soirs doux, dans les odeurs;

Ma pensée est couleur de lumières lointaines, 

Du fond de quelque crypte aux vagues profondeurs. 



Elle court à jamais les blanches prétentaines, 

Au pays angélique où montent ses ardeurs,

Et, loin de la matière et des brutes laideurs, 

Elle rêve l'essor aux céleste Athènes.



Ma pensée est couleur de lunes d'or lointaines.

Et puis voici «
L'Âme des poètes» de Charles Trenet et ses paroles, autre poème mais qui parle des poètes et de l'éternité de leurs vers:


Trenet - L'Âme des poetes (1964)



L'Âme des poètes

Longtemps, longtemps, longtemps
Après que les poètes ont disparu
Leurs chansons courent encore dans les rues
La foule les chante un peu distraite
En ignorant le nom de l'auteur
Sans savoir pour qui battait leur cœur
Parfois on change un mot, une phrase
Et quand on est à court d'idées
On fait la la la la la la
La la la la la la

Longtemps, longtemps, longtemps
Après que les poètes ont disparu
Leurs chansons courent encore dans les rues
Un jour, peut-être, bien après moi
Un jour on chantera
Cet air pour bercer un chagrin
Ou quelque heureux destin
Fera-t-il vivre un vieux mendiant
Ou dormir un enfant
Ou, quelque part au bord de l'eau
Au printemps tournera-t-il sur un phono

Longtemps, longtemps, longtemps
Après que les poètes ont disparu
Leur âme légère court encore dans les rues
Leur âme légère, c’est leurs chansons
Qui rendent gais, qui rendent tristes
Filles et garçons
Bourgeois, artistes
Ou vagabonds.

Longtemps, longtemps, longtemps, longtemps ...


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