mardi 26 janvier 2010

Ce qui résiste au feu impie

C'est l'anniversaire de la naissance d'Achim von Arnim (né en 1781).
C'est un poète romantique allemand, plus précisément prussien, ce qui n'est pas une qualité (selon mon opinion).
Mais on ne naît pas comme on veut (ou plutôt comme on l'aurait voulu) et il s'agit de ne pas agir comme on est né si notre nationalité de naissance est honteuse, ce qui est le cas ici, selon moi.
Au 20e siècle, sous Hitler, la famille de von Arnim donnera naissance à deux von Arnim généraux nazis.
Disons que le poète n'y pouvait rien et qu'il a d'avance racheté les œuvres impies de ses arrières-petits-neveux par ses propres œuvres littéraires.
D'autant plus qu'Henrich Heine, dont les œuvres seront plus tard brûlées par les Nazis * (ce grand poète était juif allemand), l'aimait et a merveilleusement traduit quelques-uns de ses poèmes en français.
Je voudrais le souligner : il est extrêmement difficile pour un traducteur de traduire à partir de sa propre langue maternelle vers une langue étrangère, comme l'était le français pour Heine.
Qu'Heine l'ait fait pour von Arnim montre l'étendue de son admiration (il était si méticuleux qu'il traduisait même le nom du poète et l'appelait « Achim d'Arnim », respectant ainsi l'esprit traditionnel du français, qui traduit aussi les noms propres, «Londres» pour «London», par exemple. Mais cet esprit s'est bien perdu aujourd'hui, hélas !).
Le tour de force est d'autant plus grand qu'Heine a traduit le poème en vers de 7 syllabes (des heptasyllabes).
Voici le poème, lequel est fondé sur un procédé très intéressant : dans chacune de ses strophes, il semble s'adresser à quatre éléments différents: un lys (strophe 1); un cèdre (strophe 2); un nuage (appelée nue, strophe 3); une flamme (strophe 4); mais le poème affirme que la flamme, allumée par l'éclair surgi du nuage, brûle lys et cèdre (et les frères de ceux-ci).
Ce qu'il y a dans les deux dernières strophes anéantit ce qu'il y a dans les deux premières.
Les généraux von Arnim et leurs maîtres nazis n'ont pas réussi, quant à eux, à anéantir l'œuvre d'Achim von Arnim, ni celle d'Henrich Heine
.

Lys superbe, lys superbe,
Avec l’air d'un jeune roi,
Tu te balances dans l’herbe ;
Lys superbe, lys superbe,
Nul n'est plus brillant que toi !

Cèdre grand, cèdre sublime,
Tu montes jusques aux cieux ;
Mais au-dessus de ta cime,
Cèdre grand, cèdre sublime,
Plane l’aigle aventureux.

Nue épaisse, nue hardie,
Tu passes l’éclair au flanc,
Et promènes l’incendie,
Nue épaisse, nue hardie,
Sur le bois et sur le champ.

Flamme sainte, flamme altière,
Que de lys jetés à bas,
Que de cèdres en poussière !
Flamme sainte, flamme altière,
Sais-tu toi-même où tu vas ?


* Heine avait prédit ce qui se passe dans un pays où on brûle des livres : « Ce n'était qu'un prélude : là où l'on brûle les livres, on finit par brûler les hommes ». (« Das war ein Vorspiel nur, dort wo man Bücher verbrennt, verbrennt man auch am Ende Menschen »).

2 commentaires:

atalante a dit…

Qu'avez vous contre les prussiens, cette fois-ci ? :)

Jack a dit…

Au cours de l'histoire, ils ont fait plusieurs choses que je désapprouve.
Au Moyen Âge, sous l'appellation de «chevaliers teutoniques», tentatives de soumissions et de massacres des peuples baltes et slaves.
Au 18e siècle, participation au dépeçage de la Pologne (deux fois).
Au 19e soumission de l'Allemagne des peuples à leur domination (sous l'appellation de IIe Reich),défaite de la France en 1870 et annexion de l'Alsace-Lorraine,déclenchement de la 1ère guerre mondiale, appui des Nazis dans le déclenchement de la 2e guerre mondiale, appui des communistes dans la proclamation de l'Allemagne de l'est.
Toujours esprit rigide militariste et protestant absolument détestable.
Et j'en passe et j'en passe.
En plus ils ont volé son nom à un peuple qu'ils ont génocidé. Je ne pardonne jamais ce genre de vol d'identité.

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