mercredi 18 février 2009

Michel-Ange, mort, amour et poèmes

C'est l'anniversaire de la mort de Michel-Ange (1564) (écrit le 18 février 2010).
Je me souviens de son tombeau (fait par Vasari) dans la belle Santo Croce de Florence (ci-dessus) où se trouvent les tombeaux ou cénotaphes des plus grandes gloires de l'Italie.
Il est à la droite de la nef , le voici :


(C'est le premier à droite)

Il a le genre « tombeau Michel-Ange » mais pas le génie je dirais.
J'ai trouvé un quatrain écrit par l'artiste qui, à tous ses génies (sculpture, peinture, architecture), ajoutait celui de la poésie.
C'est un quatrain qu'il a fait dire à « La Nuit » sculptée pour le tombeau de Julien de Médicis -elle n'est pas si belle, selon moi, mais la voici :

Les paroles que le quatrain lui fait prononcer sont plus intéressantes qu'elle-même, du moins pour un littéraire comme moi, et un littéraire de plus en plus scandalisé par son siècle.
Je l'ai traduit en alexandrins non rimés (et non malherbiens, car la césure parfois n'est pas à la place où elle devrait être) en l'adaptant (mais toute traduction est, avant tout, une adaptation qu'on tente de garder fidèle à l'original mais qui le trahit néanmoins, vous le savez).

L'original :

Grato m'è il sonno, e più l'esser di sasso.
Mentre che il danno e la vergogna dura,
Non veder, non sentir m'è gran ventura
Pero non mi destar, deh'- parla basso!

La traduction :
 
Quel bonheur de dormir, et que d'être de pierre.
Quand règnent partout la détresse et l'indécence,
Ne pas voir et ne pas entendre, quel bonheur !
Ne me réveille pas surtout, parle tout bas !
 
Il y a un autre poème, d'amour celui-là, que Michel-Ange a adressé à Tommaso de Cavalieri (pas d'article biographique où vous renvoyer : consultez l'article sur Michel-Ange).
Je n'en ai pas l'original, je ne peux donc pas m'essayer à le traduire moi-même. Je vous présente la traduction de Pierre Leyris (2004, chez Gallimard, collection Poésie) :


Je vois par vos beaux yeux une douce lumière
que par les miens, aveugles, je ne saurais voir ;
je porte avec vos pieds un fardeau sur l'échine
que les miens, claudicants, n'auraient jamais
                                                            [souffert ;


Je vole avec vos ailes, moi qui suis sans plumes,
par votre esprit sans cesse entraîné dans le ciel ;
je suis à votre gré ou livide ou vermeil,
transi dans le soleil ou chaud par froide brume.

Mon désir ne réside qu'en votre vouloir,
mes pensées ne se forgent que dans votre cœur,
mes paroles ne naissent que de votre souffle.

Je ressemble à ce qu'est, d'elle-même, la lune
dont nos yeux ne sauraient découvrir dans le ciel
qu'une portion : celle qu'embrase le soleil.

Quel amour s'exprime dans ces vers !
N'est-ce pas ?

6 commentaires:

Anonyme a dit…

Salut,
moi j'aime bien ces poèmes alors s'il vous plaît ne pas critiquer

Jack a dit…

Je ne sais pas où vous voyez que je critique. Il me semble que j'exprime au contraire de l'admiration. Parlons-nous la même langue?

Anonyme a dit…

Bonjour,
Le poème de Michel-Ange -La nuit parle- m'a intéressée si bien que j'ai cherché à voir la sculpture auquelle il est lié. Arrivée sur votre site, je constate que la traduction du poème n'est pas la même que dans mon livre. J'avais l'impression que Michel-Ange exprimait une détresse personnel -Dormir m'est cher... Vous le traduisez autrement,comme si Michel Ange avait exprimé une vérité plus général. Au fait, est-ce vraiment un poème accolé à la sculpture ? Que pouvez-vous raconter sur la sculpture ? Il semble que cela soit la seule femme dans son oeuvre sculpté. On dirait un corps d'homme avec des seins plantés là...

Diane

Jack a dit…

Oui c'est un poème accolé à la sculpture et Michel-Ange fait parler la sculpture par ce poème.
C'est la Nuit qui parle.
Quant à la sculpture c'est bien ce que vous dites : un corps d'homme avec des seins plantés là.
Je pense que Michel-Ange n'était pas intéressé sexuellement et, par conséquent, artistiquement, par les femmes et par les nudités féminines.
Les femmes qui l'intéressaient étaient des mères (dans ses Piétas par exemple) et elles étaient habillées.
Mais si cela vous était possible j'aimerais bien que vous me transcriviez dans un autre commentaire (ci-dessous) la traduction à la quelle vous avez accès.
La traduction est toujours une trahison (traduttore, traditore) mais j'aime bien voir les trahisons des autres.

Anonyme a dit…

Re-bonjour,
De: Poèmes, traduits et présentés par Pierre Leyris, Éditions Mazarine, Gallimard, 1983

La nuit parle
Dormir m'est cher et plus encore être de pierre
aussi longtemps que l'injure et la honte durent.
Ce m'est un grand bonheur de ne rien voir ni rien sentir;
ne va point m'éveiller, de grâce parle bas.

Une note de Leyris ponctue le texte: Riposte à une épigramme de Carlo Strozzi sur la Nuit de la chapelle des Médicis.
Voilà monsieur,les mots inscrits à la page 101.

Diane

Jack a dit…

Merci beaucoup, Madame.
La traduction de Leyris est peut-être plus exacte mais je préfère la mienne qui est en alexandrin français (vers de 12 syllabes) et s'applique davantage au déplorable état des choses économiques et politiques qui existe à l'heure actuelle dans notre pays et partout dans le monde que j'appelle «la détresse» (celle des pauvres et celle des persécutés) et que j'appelle «l'indécence» qui est celle des riches et des puissants de ce monde.

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