lundi 24 novembre 2008

Le Beau Costume du diable

Le costume de Méphisto* (joué par John Relyea, à gauche sur la photo), dans la représentation de La Damnation de Faust du Metropolitan Opera (dont j'ai parlé ici et dont ma femme a parlé ), m'a beaucoup plu (mais vraiment beaucoup).
Ces plumes qui font office de cornes, la couleur et les plis du cuir ailleurs, quelles riches idées ! 

Ah ! Quel magnifique costume !
Tellement que moi qui, comme tous les petits Québécois de mon époque, rêvais d'être pape quand je serais grand (sans doute pour des raisons en partie vestimentaires et théâtrales aussi : ah ! cette tiare et ces gants dorés constellés de pierreries ! Ah ! cette grosse bague brillant de mille feux ! Ah ! ces ors, ces encens, ces myrrhes !), je préfèrerais maintenant être le diable -et particulièrement Méphisto- dont le costume me rendrait peut-être attirant et dont le rôle dans la société humaine me semble maintenant bien plus utile que celui du pape dont les vains et répétitifs sermons font en sorte que :


Quoiqu[e] [...] ne pouss[ant] ni grands gestes ni grands cris
[Je] ferai(s] volontiers de la terre un débris

 Et dans un bâillement avalerai[s] le monde **

Il y a dans La Damnation de Berlioz un poème de Goethe traduit par Gérard de Nerval (il est chanté par Marguerite).
Le voici car je ne voudrais pas manquer l'occasion de citer un poème de Nerval :

Le Roi de Thulé***


Il était un roi de Thulé
À qui son amante fidèle
Légua comme souvenir d'elle,
Une coupe d'or ciselé.

C'était un trésor plein de charmes
Où son amour se conservait;
À chaque fois qu'il y buvait
Ses yeux se remplissaient de larmes.

Voyant ses derniers jours venir,
Il divisa son héritage,
Mais il excepta du partage
La coupe, son cher souvenir.

Il fit à la table royale
Asseoir les barons dans sa tour;
Debout et rangée alentour,
Brillait sa noblesse loyale.

Sous le balcon grondait la mer.
Le vieux roi se lève en silence,
Il boit, frissonne, et sa main lance
La coupe d'or au flot amer!

Il la vit tourner dans l'eau noire,
La vague en s'ouvrant fit un pli,
Le roi pencha son front pâli....
Jamais on ne le vit plus boire.
* On voit pourquoi c'est une marque de chaussures.
**Inspiré de l'avant-dernière strophe d'« Au lecteur » de Baudelaire.
*** Voici le poème de Goethe :

Es war ein König in Thule

Es war ein König in Thule,
Gar treu bis an das Grab,
Dem sterbend seine Buhle
Einen goldnen Becher gab.

Es ging ihm nichts darüber,
Er leert' ihn jeden Schmaus;
Die Augen gingen ihm über,
So oft er trank daraus.

Und als er kam zu sterben,
Zählt' er seine Städt' im Reich,
Gönnt' alles seinem Erben,
Den Becher nicht zugleich.

Er saß beim Königsmahle,
Die Ritter um ihn her,
Auf hohem Vätersaale,
Dort auf dem Schloß am Meer.

Dort stand der alte Zecher,
Trank letzte Lebensglut,
Und warf den heil'gen Becher
Hinunter in die Flut.

Er sah ihn stürzen, trinken
Und sinken tief ins Meer.
Die Augen täten ihm sinken
Trank nie einen Tropfen mehr.

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