lundi 26 mai 2008

Pluie et poésie

Le 20e siècle a expérimenté un grand nombre des possibilités de la poésie (et des autres formes de la littérature mais je m'intéresse aujourd'hui à la poésie).
Ainsi, Guillaume Apollinaire (il y a un bandeau d'Apollinaires ci-dessous, placé avant son texte) et Raymond Queneau (voir le bandeau de Queneau ci-dessous) ont inventé deux moyens différents de faire une mise en abyme de ce dont leur texte parle, -du contenu de leur texte-, en donnant à celui-ci une certaine forme.
On pourrait dire que le contenu des deux textes, si différents pourtant comme vous
allez le voir, est identique: c'est de pluie qu'il est question et c'est la pluie qu'il s'agissait de mettre en abyme.
Apollinaire a utilisé les possibilités «picturales» des lettres et des mots. Son poème est un «calligramme», c'est-à-dire un dessin créé avec des mots mais des mots qui sont organisés en phrases si on se donne la peine de les lire dans l'ordre où ils sont inscrits. Son dessin est une représentation de la pluie.

Queneau, quant à lui, a utilisé les possibilités sonores des mots pour faire sa mise en abyme: presque chaque mot est répété, chaque contenu des mots est repris par le contenu similaire d'autres mots: les mots et leur contenu sont comme des gouttes de pluie qui tombent.
Voici les deux textes, celui d'Apollinaire d'abord puis celui de Queneau.



Tiré du recueil Calligrammes (1918)
Guillaume Apollinaire
(
cliquez le texte pour zoomer et mieux le lire)





Il pleut

Averse averse averse averse averse averse
pluie ô pluie pluie ô! ô pluie ô pluie ô pluie!
gouttes d'eau gouttes d'eau gouttes d'eau gouttes d'eau
parapluie ô parapluie ô paraverse ô!
paragouttes d'eau paragouttes d'eau de pluie
capuchons pèlerines et imperméables
que la pluie est humide et que l'eau mouille et mouille!
mouille l'eau mouille l'eau mouille l'eau mouille l'eau
et c'est agréable agréable agréable
d'avoir les pieds mouillés et les cheveux humides
tout humides d'averses et de pluie et de gouttes
d'eau de pluie et d'averse sans un paragoutte
pour proteger les pieds et les cheveux mouillés
qui ne vont plus friser qui ne vont plus friser
à cause de l'averse à cause de la pluie
à cause de l'averse et des gouttes de pluie
des gouttes d'eau de pluie et des gouttes d'averse
cheveux désarçonnés cheveux sans parapluie
Tiré du recueil Les Ziaux (1943)
Raymond Queneau


1 commentaire:

Unknown a dit…

merci d'avoir fait se côtoyer ces deux textes si intéressants tous les deux et que je recherchais pour mon travail.
je vais les utiliser avec des étudiants pour approcher une chanson, Aneho (distribuée gracieusement par le ministère des affaires étrangères français dans un album intitulé "tralaclip") qui, au contraire, évoque l'eau trop rare des pays arides et l'enfant, Aneho, qui au lieu de jouer ou de se reposer va chercher de l'eau.

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